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Page:Baudelaire - L'Art romantique 1869.djvu/311

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XIV

L’ÉCOLE PAÏENNE


Il s’est passé dans l’année qui vient de s’écouler un fait considérable. Je ne dis pas qu’il soit le plus important, mais il est l’un des plus importants, ou plutôt l’un des plus symptomatiques.

Dans un banquet commémoratif de la révolution de Février, un toast a été porté au dieu Pan, oui, au dieu Pan, par un de ces jeunes gens qu’on peut qualifier d’instruits et d’intelligents.

— Mais, lui disais-je, qu’est-ce que le dieu Pan a de commun avec la révolution ?

— Comment donc ? répondait-il ; mais c’est le dieu Pan qui fait la révolution. Il est la révolution.

— D’ailleurs, n’est-il pas mort depuis longtemps ? Je croyais qu’on avait entendu planer une grande voix au dessus de la Méditerranée, et que cette voix mystérieuse, qui roulait depuis les colonnes d’Hercule jusqu’aux rivages asiatiques, avait dit au vieux monde : Le dieu Pan est mort !

— C’est un bruit qu’on fait courir. Ce sont de mau-