Page:Baudelaire - Théophile Gautier, 1859.djvu/21

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lement la part légitime de temps consacrée aux plaisirs de l’esprit. Mais ce ne serait là qu’une explication insuffisante ; car, pour laisser de côté le poète qui fait le sujet de cette étude, je m’aperçois que le public n’a glané avec soin dans les œuvres des autres poètes que les parties qui étaient illustrées (ou souillées) par une espèce de vignette politique, un condiment approprié à la nature de ses passions actuelles. Il a su l’Ode à la Colonne, l’Ode à l’Arc de Triomphe, mais il ignore les parties mystérieuses, ombreuses, les plus charmantes, de Victor Hugo. Il a souvent récité les iambes d’Auguste Barbier sur les journées de Juillet, mais il n’a pas, avec le poète, versé son pianto sur l’Italie désolée, et il ne l’a pas suivi dans son voyage chez le Lazare du Nord.

Or, le condiment que Théophile Gautier jette dans ses œuvres, qui, pour les amateurs de l’art, est du choix le plus exquis et du sel le plus ardent, n’a que peu ou point d’action sur le palais de la foule. Pour