Page:Baudry - Rue Principale 1 les Lortie, 1940.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
158
RUE PRINCIPALE

— Je n’en sais rien. Mais ce que je sais, c’est que ta petite bêtise fut pour moi la fin d’une illusion. Et tu sais, tuer une illusion, c’est peut-être encore le meilleur moyen de tuer un amour. Je t’en prie, laisse-moi passer, je suis déjà suffisamment en retard comme ça !….

***

Bob s’en fut dire au chef Langelier qu’il s’avouait vaincu et, suivant la coutume, il le pria de confier l’enquête à un de ses collègues. Suivant la coutume également, le chef Langelier lui assura qu’il n’en ferait rien et, voyant combien cet échec le déprimait, lui donna congé pour le restant de la journée.

Une heure après, Bob qui errait dans le parc, rencontra monsieur Bernard. Poussé par cet irrésistible besoin qu’éprouvent les amants malheureux de s’épancher, il lui conta sa conversation avec Ninette.

— Comme vous voyez, monsieur Bernard, conclut-il, mon chien est mort.

— Vous vous résignez facilement, mon cher Bob.

— Oh ! facilement, non. Mais enfin, qu’est-ce que vous voulez ? Je suis pas un fou, quand je suis battu, je suis capable de m’en rendre compte.

— Êtes-vous bien sûr de lui avoir parlé comme il fallait ?

— Je ne sais pas, moi. Je lui ai parlé comme je pouvais : je lui ai dit tout ce que je ressentais ! Qu’est-ce que je pouvais dire de plus ?

— Et tout ce qu’elle vous a répondu, c’est que vous aviez tué en elle une illusion : et que tuer une illusion c’est encore le meilleur moyen de tuer un amour ?

— Oui, monsieur Bernard.