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LES LORTIE

— Tu le sais, répondit-il, je te l’ai dit. Il a consenti à attendre quatre jours de plus.

— Quatre jours, ça veut dire jusqu’à demain soir.

— Ben oui.

— Et alors, demanda-t-elle, que vas-tu faire, une fois les quatre jours écoulés ?

La question parut étonner Sénécal.

— Ce que je vais faire, ce que je vais faire ? On est tous les deux dans cette affaire-là, tu as l’air de l’oublier.

Ce fut au tour de Suzanne de paraître surprise. Mais le ton étonné qu’elle prit pour répondre avait quelque chose de voulu, d’étudié, quelque chose de moqueur aussi.

— Tous les deux ? dit-elle. Non, Léon, non, ça ne m’inquiète pas le moins du monde. J’ai bien peur que tu sois obligé de te débrouiller tout seul.

— Ah non ! rétorqua Sénécal, ça fait assez longtemps que tu te dérobes, assez longtemps que tu as l’air de me mettre tout sur le dos. C’est deux cents piastres que j’ai promis à Jeannotte, pour mettre le poison dans le lait de Ninette et faire la petite job à la machine de monsieur Bernard ; puis même s’il se contente de ça, au lieu des cinq cents qu’il a le front de nous réclamer à cette heure, c’est deux cents piastres que ça va coûter et, que tu le veuilles ou non, tu vas en payer la moitié.

— Pas un sou, fit-elle avec une insolence qui donna à Sénécal une furieuse envie de lui sauter à la gorge.

Elle s’en rendit compte, s’écarta quelque peu et reprit :

— Non seulement je ne paierai pas, mais je ne veux plus en entendre parler. Si tu crois qu’il vaut mieux lui payer ses deux cents piastres, paye-les