Page:Baudry - Rue Principale 1 les Lortie, 1940.djvu/198

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

XXVII

les promesses de jules lanctôt

Tandis que Jules Lanctôt se morfondait en prison et réfléchissait aux inconvénients qu’il peut y avoir à abuser de la crédulité des vieilles filles, sa victime, la trop romanesque Cunégonde, sentait fondre son ressentiment et se tempérer son indignation. Chaque nuit, depuis le jour où, outragée, elle avait exigé l’incarcération de son amoureux, elle l’avait revu en rêve, se tordant sur le maigre grabat de sa cellule, en proie à des crises de folie épouvantables. Et ses rêves se terminaient toujours de même façon : Jules passait de vie à trépas en maudissant celle qui l’avait envoyé à la mort. Aussi, chaque matin, poussait-elle un large soupir de soulagement, lorsqu’elle apprenait que le prisonnier se portait à merveille.

Lanctôt, lui, dans sa cellule, oubliant ses maladies imaginaires, était la proie d’une idée fixe : sortir de là au plus tôt et faire payer cher, le plus cher possible, sa mésaventure à celle qui avait eu l’outrecuidance de ne pas se laisser tondre sans rien dire. Oh ! il ne rêvait pas de vengeances éclatantes ni de supplices chinois. Ce qu’il entendait par lui faire payer cher les mécomptes qu’elle lui avait infligés, c’était tout simplement prendre une nouvelle offensive contre les fortifications de son compte de banque. On le voit, les projets de vengeance de Jules Lanctôt s’accommodaient fort bien de sens pratique