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XI

l’écrasant témoignage de léon sénécal

Le procès de Marcel Lortie avait attiré au palais de justice une foule assez considérable. N’était-ce pas la première fois, depuis bien des années, qu’on allait juger un homme dont la culpabilité n’était pas un fait nettement établi ; un homme qui se prétendait innocent et vers qui montaient bien des sympathies ? On allait donc assister à un vrai procès ! Il allait donc falloir que Falardeau, l’avocat de la couronne, prouvât quelque chose, alors que de coutume il lui suffisait d’étaler les preuves fournies par la police ou de produire l’aveu du délit, avant de prononcer un de ces réquisitoires ampoulés qui étaient sa spécialité, et qui se ressemblaient tous comme des copies d’une même gravure. De plus, ne chuchotait-on pas, depuis la veille, que Marcel serait défendu par Maître Léon Martin, un des meilleurs avocats de Montréal, et que, par conséquent, on allait peut-être assister au spectacle rarissime d’un Falardeau n’ayant pas le dernier mot ? En fallait-il plus pour que quelques douzaines de commères abandonnent leur cuisine, et pour qu’une cinquantaine de rentiers et de chômeurs aillent au palais tuer un temps qui n’avait pas grande valeur ?

Après le cérémonial d’usage, le greffier avait lu l’acte d’accusation et posé la question traditionnelle :

一 Coupable ou non coupable ?

Marcel, d’une voix nette, avait répondu :