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tuait une forteresse puissante contre tout ennemi de l’est et du sud du royaume.

Le commerce ne rencontrait que peu d’obstacles et le marché de Lyon qui était déjà au moyen-âge un des plus grands de la France, allait devenir un des premiers de l’Europe, le premier peut-être après Venise. Située aux frontières de la France, du Dauphiné et de la Savoie, sur deux fleuves navigables qui la mettaient en communication directe avec la Bourgogne, la Suisse et la Provence, elle était en même temps la porte principale du commerce italien avec le nord de la France, les Pays-Bas et une partie considérable de l’Allemagne[1]. Les rois, dès le commencement du quinzième siècle, autorisèrent donc la ville à avoir deux, plus tard même quatre foires franches par an, chacune de la durée de quinze jours. Les commerçants les plus actifs de l’Europe s’y réunissaient pour contracter leurs affaires ; les productions les plus diverses de tous les pays y étaient échangées[1]. De petits artisans qu’ils avaient été autrefois, les Lyonnais se transformaient en commerçants aux vues larges et aux entreprises hardies.

Les financiers les plus habiles et les plus influents que l’Europe connût à cette époque, les Florentins, s’aperçurent bientôt qu’un tel centre commercial était le terrain le plus favorable à leurs entreprises. Nous trouvons dès le milieu du quinzième siècle quelques succursales des grandes maisons de banque florentines à Lyon, les Médicis, les Strozzi, les Capponi, les Gondi, les Guadagni, les Arnolfini et autres qu’il serait inutile de nommer ; en-

  1. a et b Laissons parler quelques chiffres sur l’importance du commerce lyonnais au xvie siècle. Nicolas de Nicolay, géographe du roi, fut chargé par Catherine de Medicis, vers 1560, de faire une description générale du royaume. Il n’y a qu’une partie de ce projet qui ait été réalisée : c’est la description de Lyon (Description générale de la ville de Lyon et des anciennes Provinces du Lyonnais et du Beaujolais p.p. la société de Topographie historique de Lyon. Lyon 1882). L’auteur qui esquisse dans ce livre déjà le système mercantile de Colbert, y mentionne les chiffres suivants concernant l’importation annuelle de marchandises étrangères : Pays du nord : Toiles de Saint Gall, chevaux d’Allemagne, de Hongrie, de Danemark, martres subelines et autres fourrures précieuses, satin de Bruges : 560,000 livres. Tapisseries de haute lisse d’or et de soye : 900,000 livres. Grande quantité de drogues d’Anvers : 400,000 livres, — pierres précieuses et parfums ; 500,000 livres. Poissons salés de l’étranger : 100,000 livres, — fromages de Hollande 12,000 livres. Angleterre : Or, étain, plomb : 2 — 300,000 livres, — laine et draps fins 200,000 livres. Portugal : Épiceries, pierreries, perles et parfums : 700,000 livres, — fruits et vins 1,800,000 livres. Espagne : Soi grège : 2,000,000 livres, or et argent : 300,000 livres, armes : 5000 livres. Objets de luxe : 200,000 livres. Italies (sic) Levant et Barbarie : Draps d’or et d’argent, soies, rubans, boutons et aultres ouvrages de toute sorte et façons, fort exquis et de hault pris : armes et mil aultres petites denrées exquises de grand coust et peu de prouffit : 13 à 14,000 000 livres. — Pouille et Calabre : pour plus de 400,000 livres d’épiceries et drogueries, pierres, plumes d’autruche et autres objets de luxe, estamets fins de Venise, Milan et Florence 5 à 600,000 livres. Vaisselle de porcelaine, marbre, albâtre, émail, verres et autres ouvrage de cristallins, cordouan et maroquins, raisins de Corinthe, azur d’outre mer, faucons, etc. etc. : 5 — 600,000 livres.