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Les amis de la plupart des autres poètes du seizième siècle, leur ont dressé à cette occasion un „tombeau“ poétique, ou bien ont prononcé une oraison funèbre sur leur tombe ; rien de cela n’existe pour Maurice Scève ; autant de sources qui manquent pour sa biographie.

Les documents officiels qui auraient pu nous renseigner sur le chef de l’école lyonnaise, n’ont pas été favorisés par le destin, il n’existe point de registres paroissiaux de Lyon pour les temps de Scève ; ils ont été égarés probablement pendant les guerres de religion dont la ville eut beaucoup à souffrir. Des actes juridiques du seizième siècle, conservés avec soin jusqu’à l’époque de la Révolution, ont été abîmés dans ce temps par un fonctionnaire maladroit. Les archives réunies des notaires lyonnais qui contiennent peut-être des documents qui pourraient élucider plus d’un point obscur, n’ont pas encore été ouvertes à des recherches scientifiques.

Il m’a donc fallu construire la biographie de Scève avec des matériaux trouvés par hasard, très modestes pour la plupart et très peu sûrs. Ils ont toutefois suffi pour extirper quelques erreurs souvent répétées par ceux qui ont parlé de notre auteur. Mais sa biographie, telle que nous la présentons aujourd’hui, est encore pleine de lacunes que nous avons dû combler tant bien que mal par des conjectures.

La famille Scève n’est point d’origine italienne comme on l’a prétendu si longtemps ; elle n’a rien à faire avec l’illustre maison piémontaise des marquis de Ceva[1]. Les recherches de M. William Poidebart[2] ont démontré avec certitude qu’elle est originaire de Chasseley, petit bourg du Mont d’Or lyonnais où le nom de Scève est assez fréquent dans les documents du quinzième et seizième siècle.

  1. Cette erreur est de vieille date ; le premier qui en fasse mention est le père Bullioud dans son Lugdunum sacro-profanum qu’il écrivit au commencement du dix-septième siècle. L’abbé Pernetti (Mémoires pour servir à l’histoire de Lyon, 2 vol. Lyon 1757) assure que les Sève de son temps avaient les mêmes armes que les marquis de Ceva, et il cite toute la teneur d’un certificat de noblesse de la main de Charles-Emmanuel de Savoie, daté du 25 janvier 1620, qui fait foi de l’identité des deux familles. — Tout cela ne prouve rien ; ni Charles Emmanuel ni ses historiographes ne connaissaient les sources pour établir cette identité ; la fabrication de généalogies était du reste un métier fréquemment exercé et très lucratif au dix-septième siècle, et les Sève peuvent avoir acquis de cette façon des titres de haute noblesse. Au seizième siècle ils écrivaient toujours leur nom sans la particule de, mais avec Sc.

    Comparez pour l’histoire postérieure de la famille de Scève : Guichenon, Histoire de la souveraineté de Doubes. p. p.M.-C. Guigme. Lyon 1874 et Pernetti, op. cit.

  2. Préface de la réédition de Charles Fontaine : Ode de l’antiquité et excellence de la ville de Lyon. Lyon 1889.