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ANABAPTISTES.

par malice ; qu’ils condamnaient les fureurs de ceux de Munster ; qu’ils enseignaient que le règne de Jésus-Christ ne doit s’établir que par la croix : Ils sont donc, ajoute-t-il, plus dignes de compassion et d’instruction que d’être persécutés ; et il leur applique un beau passage de saint Augustin : Hujus quem dixi Mennonis, cui nunc hic Theodoricus successit, sectatores ferè sunt omnes qui per hæc Belgicæ et Germaniæ inferioris loca ; huic anabaptisticæ hæresi affines deprehenduntur, in quibus magnâ ex parte pii cujusdam animi argumenta cernas, qui imperito quodam zelo incitati, errore potiùs quàm animi malitiâ à vero divinarum litterarum sensu, et concordi totius Ecclesiæ consensu desciverunt, quod ex eo perspici potest, quòd Monasteriensibus et hinc consecutis Batenburgicis furoribus, novam quandam restitutionem regni Christi, quod in deletione impiorum per vim externam positum sit, meditantibus, acerrimè semper restiterunt, et in solâ cruce regni Christi instaurationem et propagationem consistere docuerunt : quo fit, ut qui hujusmodi sunt, commiseratione potiùs et emendatione quàm insectatione et perditione digni videantur. His enim multò magis convenire videtur quod de Manichæis disputans inquit August. [* 1] : Quanquam Dominus per servos suos regna subvertat erroris, ipsos tamen homines, in quantum homines sunt, emendandos esse potiùs quàm perdendos jubet… Atque utinan qui atrociore in hosce miseros sunt animo, mansuetudinem et prudentiam hujus sancti viri imitentur, qui in disputatione adversùs Manichæos… his verbis est usus [* 2]. Illi, inquit, in vos sæviant, qui nesciunt cum quo labore verum inveniatur, et quàm difficilè caveantur errores. Illi in vos sæviant, qui nesciunt cum quantâ difficultate sanetur oculus interioris hominis, ut possit intueri solem suum. Illi in vos sæviant, qui nesciunt quibus suspiriis et gemitibus fiat, ut ex quantulâcunque parte possit intelligi Deus [1]. Voilà ce qu’il dit au duc de Clèves en lui dédiant un livre où il prouve que la doctrine du baptême des enfans n’a souffert aucune contradiction dans l’ancienne Église. Le consentement universel de tous les chrétiens pendant plusieurs siècles lui paraît une si puissante preuve qu’un dogme vient des apôtres, qu’il ne croit pas qu’on puisse mieux réfuter les anabaptistes que par la force de cet argument. Il en savait la vertu par expérience ; car il dit qu’un docteur anabaptiste, prisonnier au château de Clèves, se convertit avec quelques autres de ses adhérens, dès qu’il eut vu le recueil de témoignages qui fait voir l’antiquité de la tradition sur ce point-là. Ce fut la raison pourquoi Cassander fit voir le jour à son ouvrage. Disons qu’il conféra deux fois avec des anabaptistes ; premièrement à Cologne, avec un certain Matthias, l’an 1556, et puis avec le nommé Jean Kremer, prisonnier dans le comté de la Mark, l’an 1558. J’ai transposé l’ordre de l’auteur que je vais citer ; car son iterùm est contradictoire : Georgius Cassander, dit-il[2], bis cum illis coram disputavit, de quo inter ejus Opera fol. 1227 : semel cum Johanne Kremer, a. ciↄ iↄ captivo in Comitatu Marchiæ ; iterùm, a. ciↄ iↄ lvi, cum Matthiâ aliquo, Coloniæ.

(H) Les théologiens protestans ont combattu cette secte avec zèle dans les Provinces-Unies, et ont obtenu des édits pour la réprimer. ] Ils ont provoqué diverses fois à la dispute les anabaptistes. Le synode de Horn fit un acte sur cela, et recourut même à l’autorité du gouverneur : Ecclesiæ nostræ semper bonum ac utile censuerunt, adversarios ad disputationem et colloquia provocare. Synodus Hornana a. ciↄ iↄ lxxx, et a. ciↄ iↄ lxxvi, imploratâ eum in finem Gubernatoris Theod. Sonnoyi auctoritate.... decernit provocandum, etc. [3]. Trois ou quatre synodes firent de semblables actes avant la fin du XVIe. siècle[4]. Les églises trouvèrent bon, l’an 1599, que l’on composât un ouvrage qui contînt le corps des controverses anabaptistiques. Arminius, minis-

  1. (*) Contra Epistolam Fundamenti.
  2. (*) Ibidem.
  1. Georgius Cassander, præfat. Tractatus de Baptismo Infantium.
  2. Hoornbeek, Summa Controvers., pag. 394.
  3. Idem, ibid. Notez qu’il transpose les temps : il met le synode de 1576 après celui de 1580.
  4. Idem., ibid.