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ARMINIUS.

faire des invectives contre la Thalie d’Arius, il faut les avertir de ce que le père Maimbourg publia contre les psaumes que Clément Marot a traduits. Il n’en dit guère moins de mal que de la Thalie d’Arius. Ce qu’il dit de la Thalie se trouve dans son Arianisme [1], et voici ce qu’il dit des psaumes, dans son Histoire du Calvinisme [2] : Ce sont là les psaumes qu’on chantait alors, auxquels Bèze ajouta depuis le reste du psautier, et qui furent mis en musique, en un certain air de chanson mou et efféminé, qui n’a rien du tout de devot et de majestueux comme le chant de l’Église catholique. On ne peut tout-à-fait nier ce que raconte Varillas, Que les airs furent choisis parmi les plus belles chansons du temps [3]. Voyez la divine mélodie de Jérémie de Pours [4]. Ce n’est pas sans raison que j’ai allégué en exemple les chansons de l’Opéra : j’ai voulu faire connaître qu’il faut éviter plus soigneusement limitation des airs du Pont-Neuf dans les cantiques spirituels ; autrement on expose trop la religion au mépris et à la risée, comme il paraît par le livre dont l’auteur de l’Évêque de Cour s’est tant moqué [5]. C’est un recueil de chansons spirituelles, composées par un jésuite et par le père Martial de Brive, capucin, sur les airs les plus burlesques qui eussent été chantés dans les rues, sur l’air de Daye d’en Daye, sur celui de Vous y perdez vos pas, Nicolas, etc. Je doute que la Thalie d’Arius approchât de l’impertinence de ce recueil, imprimé avec l’approbation de deux docteurs en théologie.

(M) Un auteur moderne... a écrit quelques ouvrages pour montrer que des pères des trois premiers siècles étaient de l’opinion d’Arius. ] Il s’appelait Sandius. Ce qu’il a écrit sur cette matière est Nucleus Historiæ Ecclesiasticæ, en 1668, in-8o. ; le même livre fort augmenté en 1616, in-4o. ; Appendix addendorum, confirmandorum, et emendandorum ad Nucleum Historiæ Ecclesiasticæ, cum Responsionibus ad Gardinerum, en 1678, in-4o.

  1. Tom. I, pag. 81, édition de Hollande.
  2. Pag. 99.
  3. Varillas, Hist. de l’Hérésie, liv. XXI, pag. 49, à l’an 1559.
  4. Liv. II, pag. 577.
  5. Voyez son IIIe. Entretien, pag. 86 et suiv. édition de Hollande, en 1674, in-12.

ARMINIUS [* 1] (Jacques), professeur en théologie à Leyde, naquit à Oude-water [a], en Hollande l’an 1560 (A). Il était encore enfant lorsque son père mourut, et il fut redevable de sa première instruction à un bon prêtre, qui avait goûté les sentimens des réformés, et qui, pour n’être pas obligé à dire la messe, changeait souvent de demeure. Il étudiait à Utrecht lorsque la mort lui enleva ce patron. Cette perte l’aurait fort embarrassé, s’il n’avait eu le bonheur d’être secouru par Rodolphe Snellius son compatriote, qui le mena avec lui à Marbourg, l’an 1575. Il y fut à peine arrivé, qu’il apprit que sa patrie avait été saccagée par les Espagnols. Cette nouvelle le plongea dans une affliction affreuse, et il ne put s’empêcher de retourner en Hollande, pour voir lui-même l’état où les choses étaient réduites ; mais ayant trouvé que sa mère, sa sœur, ses frères, sa parenté, et presque tous les habitans d’Oude-water avaient été égorgés, il retourna à Marbourg, et fit à pied tout ce voyage. Il ne tarda guère à revenir en Hollande, ayant su la fondation de l’académie de Leyde, et il étudia dans cette nouvelle académie avec tant d’application et tant de succès, qu’il s’acquit une estime toute particulière. Il fut

  1. * M. Stapfer, dans la Biographie universelle, dit que son nom est Harmensen.
  1. Ce mot en Flamand veut dire vieille eau, et de là vient que le nom de patrie que l’on donne à Arminius, dans le titre de ses livres, est Vétéraquinas.