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ARTÉMIDORE.

mêmes sciences, comme il paraît par les deux livres qu’il lui dédia. Je m’étonne moins qu’il se soit si fortement occupé de cette matière, quand je songe qu’il croyait y avoir été poussé par les conseils, et en quelque manière par les ordres d’Apollon [a] ; Il prie fort sérieusement tous ses lecteurs de ne rien ôter de son livre, et de n’y rien ajouter ; et il leur fait là-dessus une espèce d’adjuration au nom de cet œil perçant de la providence qui prend garde à tout (F). Il a dédié ses trois premiers livres à un Cassius Maximus (G), et les deux autres à son fils. Ils furent imprimés en grec, à Venise, l’an 1518. M. Rigaut les publia à Paris, en grec et en latin, l’année 1603, et y joignit quelques notes. La version latine qu’il employa est celle que Jean Cornarius avait publiée à Bâle l’an 1539. Artémidore avait fait un traité des Augures, et un autre de la Chiromance. On ne les a point (H). Tertullien ne l’a point cité dans l’endroit où il cote plusieurs auteurs onirocritiques [b] ; mais Lucien ne l’oublie pas, quoiqu’il ne nomme que deux écrivains de cette espèce [c].

  1. Idem, sub fin., lib. II, pag. 161.
  2. C’est-à-dire, interprètes des songes. Voyez ce passage de Tertullien ci-dessous, citation (14).
  3. Lucian., in Philopatr.

(A) Il s’est donné le surnom de Daldianus, afin de faire honneur à la patrie de sa mère [1]. ] « Éphèse, dit-il, d’où à la tête de plusieurs livres j’ai déclaré que j’étais, est assez illustre par elle-même, et par les louanges que plusieurs personnes dignes de foi lui ont données ; mais la petite ville de Daldia est demeurée jusqu’ici dans l’obscurité, faute de tels panégyristes : puis donc que c’est ma patrie du côté de ma mère, je veux lui témoigner ainsi ma reconnaissance. » Cela me serait plus suspect de vanité, si j’y voyais plus de façon et plus de mystère ; mais l’ingénuité avec laquelle cet auteur s’exprime, me fait juger qu’il parlait selon l’usage d’alors, et sans attacher aux paroles les mêmes idées que l’on y attacherait aujourd’hui. Τὴν δὲ ἐπιγραϕὴν μὴ θαυμάσῃς, διότι Ἀρτεμιδώρου Δαλδιανοῦ, καὶ οὐχὶ Ἐϕεσίου, ἐπιγέγραπται, ὥσπερ πολλὰ τῶν ἤδη εἰς ἄλλας πραγματείας πεποιημένων μοι βιϐλίων. Τὴν μὲν γὰρ Ἔϕεσον συμϐέϐηκε καὶ αὐτὴν δι ἑαυτὴν περιώνυμον εἶναι, καὶ πολλῶν ἀξιολόγων κηρύκων τετυχηκέναι. Δάλδία δὲ, πόλισμα Λυδίας καὶ οὐ σϕόδρα ἐλλόγιμον, καὶ διὰ τὸ μὴ τοιούτων ἀνδρῶν τετυχηκέναι, ἄγνωςον τὸ μέχρι εἰς ἐμε μεμένηκε. Διὸ θρεπτήρια οὔσῃ μοι πατρίδι πρὸς μητρὸς ταῦτα ἀποδίδωμι αὐτῇ [2]. At verò de inscriptione ne mireris quapropter Artemidori Daldiani et non Ephesii inscriptum legis, quemadmodùm multos jam alios libros diversis argumentis à me conscriptos habere vidisti. Etenim Ephesum contigit ipsam per seipsam celebrem esse, insuperque multos præclaros et fide dignos præcones nancisci : Daldia autem Lydiæ oppidulum non valdè clarum, proptereà quòd ejusmodi viros non est nactum, usque ad me penitùs ignobile permansit. Quapropter ipsi quod mihi à matre patria existit, hæc in nutritiorum vicem rependo. Il fallait s’en tenir à cette raison, et n’en pas chercher deux autres comme a fait M. Rigaut : l’une prise de ce qu’Apollon avait inspiré à Artémidore dans la ville de Daldia le dessein d’expliquer les songes ; l’autre prise de ce qu’y ayant un autre Artémidore d’Éphèse, il fallait que l’interprète des songes ne se donnât pas le surnom d’Éphésien, occupé déjà par l’autre [3]. Cette dernière raison, plus mauvaise que la précédente, a été adoptée pourtant par un homme de mérite [4]. Artémidore la réfute

  1. Daldia, petite ville dans la Lydie.
  2. Artemid., lib. III, sub fin. pag. 193.
  3. Rigalt., Not. in Artemidor., pag. 1.
  4. M. de Tillemont, au IIe. tome de l’Hist. des Empereurs, IIe. part., pag. 731, édit. de Bruxelles.