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ATRAX ou ATRACIA.

que temps. Ensuite il devint intime ami de Muréna, et s’enfuit avec lui quand on eut découvert que Muréna avait conspiré contre Auguste. Il fut pris dans sa fuite ; mais l’empereur, ne le trouvant point coupable, le mit en liberté. Athénée retourna à Rome, et dit à ceux qu’il rencontra les premiers ces paroles d’Euripide :

» Ἥκω νεκρῶν κευθμῶνα καὶ σκότου πύλας
» Λιπῶν [* 1] ......................


» Je viens de quitter l’antre des morts, et les portes de l’enfer. » On ne saurait comprendre l’origine de ces faussetés de M. Moréri, car il semble qu’il soit plus malaisé de gâter ainsi les choses, que de les rapporter telles qu’on les trouve.

  1. * Eurip. Hecuba, v. I.

    qui par leurs harangues s’acquéraient un grand crédit sur le peuple et lui faisaient prendre telle ou telle résolution.

ATRAX ou ATRACIA [a], ville de Thessalie [b], sur le Pénée, eut ce nom à cause qu’Atrax, fils de Pénée et de Bura, la fit bâtir [c]. Elle devait être considérable, puisque les poëtes se sont quelquefois servis de l’épithète Atracien, pour signifier Thessalien (A). Pline met les Atraciens parmi les peuples d’Étolie [d], mais il ne faut pas inférer de là qu’il ait prétendu parler d’un peuple différent de celui qui habitait la ville d’Atrax, qu’il attribue à la Thessalie [e]. Les confins des peuples et les divisions des provinces ont souvent changé, et ainsi le même canton qui appartenait en un temps à l’Étolie, était censé Thessalien en un autre temps. La rivière Atrac, qui avait son embouchure dans la mer Ionienne [f], passait par le pays des Atraciens.

  1. Stephan. Byzantin., verbo Ἄτραξ.
  2. Strabo, lib. IX, pag. 303.
  3. Stephan. Byzantin., verbo Ἄτραξ.
  4. Plinii Hist. natur., lib. II, cap. II.
  5. Ibidem, cap. VIII.
  6. Ibidem, lib. IV, cap. II.

(A) Les poëtes se sont quelquefois servis de l’épithète Atracien, pour signifier Thessalien. ] Céneüs, qui fut tué dans le combat des Centaures et des Lapithes, aux noces de Pirithoüs, est appelé Atracides par Ovide [1], non pas pour signifier qu’il était fils d’Atrax, car un peu auparavant on l’avait nommé fils d’Élatus [2], mais pour signifier en général qu’il était de Thessalie. Je n’ignore pas que selon d’autres auteurs [3] il était fils d’Atrax. Le même poëte nomme simplement Atracis la femme de Pirithoüs.

Desine mirari posito quod candida vino
Atracis ambiguos traxit in arma viros [4].


Il lui donne ailleurs le nom propre Hippodamie ; mais il y ajoute l’épithète Atracis.

An fera centauris indicere bella coëgit
Atracis Hæmonios Hippodamia viros [5] ?


Valérius Flaccus a désignée par les mots Atracia Virgo [6].

On ne peut pas supposer qu’Ovide entend qu’elle est fille d’Atrax, on prouverait trop par-là. Il faudrait aussi conclure qu’il a donné à Céneüs le même père ; mais il l’a fait fils d’Élatus, et il n’a point dit que Céneüs était frère de la mariée : omission impardonnable, s’il l’avait cru le beau-frère de Pirithoüs.

Je crois qu’Apulée s’est imaginé que le nom propre de la femme de Pirithoüs était Atracis ; car comme il écrivait en prose, il ne l’eût pas ainsi nommée, s’il eût su que ce mot-là n’était qu’un jeu ou qu’une figure poëtique. Sic instar Atracis, dit-il [7], vel (lisez et) Pirithoï dispectæ disturbatæque nuptiæ. Béroalde a fort bien compris qu’il s’agit là d’Hippo-

  1. Ovidii Metamorph., lib. XII, vs. 209.
  2. Proles Elateia, ibid., vs. 189.
  3. Antonini Liberal. Metamorph., cap. XVII.
  4. Ovidii Amorum lib. I, eleg. IV, vs. 7.
  5. Ovidius, Epist. Helenæ, vs. 247.
  6. Valerii Flacci Argon., lib. I, vs. 141.
  7. Apuleii Metamorph., lib. IV, pag. 357 editionis anni 1615.