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AURÉLIEN.

ils furent décernés sans aucun délai. Tacite [1], qui opina le premier dans le sénat, fit un beau discours qu’on sera bien aise de trouver ici, puisqu’il contient un juste abrégé des actions les plus éclatantes d’Aurélien, et quelques pensées assez curieuses. Rectè atque ordine consuluissent dii immortales, P. C., si boni ferro inviolabiles extitissent, ut longiorem ducerent vitam : neque contra eos aliqua esset potestas iis qui neces infadas tristissimâ mente concipiunt. Viveret enim princeps noster Aurelianus, quo neque utilior fuit quisquam. Respirare certè post infelicitatem Valeriani, post Gallieni mala, imperante Claudio cœperat nostra respublica : at eadem reddita fuerat Aureliano toto penitùs orbe vincente. Ille nobis Gallias dedit ; ille Italiam liberavit ; ille Vindelicis jugum barbaricæ servitutis amovit. Illo vivente Illyricum restitutum est, redditæ romanis legibus Thraciæ. Ille (proh pudor !) Orientem fœmineo pressum jugo in nostra jura restituit ; ille Persas insultantes adhuc Valeriani nece, fudit, fugavit, oppressit. Illum Saraceni, Blemyes, Axomitæ, Bactriani, Seres, Hiberi, Albani, Armenii, populi etiam Indorum, veluti præsentem penè venerati sunt deum. Illius donis quæ à Barbaris gentibus meruit, refertum est Capitolium : quindecim millia librarum auri ex ejus liberalitate unum tenet templum, omnia in urbe fana ejus micant donis. Quare, P. C., vel deos ipsos jure convenio, qui talem principem interire passi sunt, nisi fortè secum eum esse maluerunt. Decerno igitur divinos honores : id quod vos omnes existimo esse facturos. Nam de imperatore deligendo ad eundem exercitum censeo esse referendum. Etenim in tali genere sententiæ nisi fiat quod dicitur, et electi periculum erit, et eligentis invidia. Probata est sententia Taciti [2]. Le même Tacite ayant été élu empereur quelques mois après [3], commença son règne par ordonner que l’on érigeât quatre statues à Aurélien, une d’or dans le Capitole, et trois d’argent en d’autres lieux, et que chacun fût pourvu du portrait de ce grand prince. Les trois statues d’argent furent dédiées, mais non pas celle du Capitole. In eâdem oratione Aureliano statuam auream ponendam in Capitolio decrevit : item statuam argenteam in Curiâ, item in templo Solis, item in foro divi Trajani. Sed aurea non est posita : dedicatæ autem sunt solæ argenteæ. In eâdem oratione cavit, ut si quis argento publicè privatimque æs miscuisset, si quis auro argentum, si quis æri plumbum, capital esset cum bonorum proscriptione….… Addidit, ut Aurelianum omnes pictum haberent [4].

(L) Il n’y eut point de divinité pour qui il témoignât plus de zèle que pour le Soleil. ] Il me semble que sa première éducation fut la cause de ce culte ; car apparemment sa mère, qui était prêtresse du Soleil, lui inspira dès l’enfance une dévotion particulière pour cette divinité [5]. Quoi qu’il en soit, nous trouvons que lorsqu’il remercia Valérien, qui l’avait désigné consul, il se servit de ces termes : Dii faciant et deus certus Sol, ut et senatus de me sic judicet [6]. Un savant homme [7] prétend qu’il parla ainsi dans une lettre [8], comme si les autres dieux : étaient douteux, hors le Soleil seul. Dans la bataille qu’il gagna proche d’Émesse sur les troupes de Zénobie, on prétend qu’il fut secouru par une divinité qui encouragea les soldats, et qui fit que l’infanterie soutint la cavalerie prête à s’enfuir [9]. Dès qu’il fut entré victorieux dans Émesse, il alla au temple du Soleil : Statim ad templum Heliogabali tetendit, quasi communi officio vota soluturus, et y trouva la même figure de divinité qui lui avait été favorable dans le combat. C’est pourquoi il fonda des temples dans ce lieu-là [10], et puis il fit construire à Rome un temple au Soleil [11]. Il fit rebâ-

  1. Il fut élu empereur quelques mois après.
  2. Vopisc., cap. XLI, pag. 526, 527.
  3. Ce fut par le sénat, car l’armée à qui de sénat laissa l’élection d’un nouveau prince renvoya toujours ce soin au sénat qui enfin s’en chargea.
  4. Vopisc., in Tacito, cap. IX, pag. 608.
  5. Idem, in Aureliano, cap. IV.
  6. Idem, ibidem, cap. XIV.
  7. Spanheim, Notes sur les Césars de Julien, pag. 109.
  8. Vopiscus lui fait tenir de vive voix ce langage.
  9. Vopisc., cap. XXV.
  10. Illic templa fundavit donariis ingentibus positis. Vopisc., cap. XXX.
  11. Idem, ibid., et cap. XXXV.