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ANDRADA.

lui par les protestans : c’est à cause qu’il a soutenu des sentimens un peu outrés sur le salut des philosophes païens. Il était prédicateur : on a publié ses Sermons en trois parties, dont la seconde a été traduite de portugais en castillan par Benoît de Alarcon [a]. La Bibliothéque des écrivains espagnols ne parle point de tous ses ouvrages (D). On a donné bien des louanges à Andradius (E) : on les trouvera dans les remarques.

  1. Ex Nicolai Antonii Biblioth. Hispan., tom. I, pag. 236.

(A) Il répondit à un écrit de Chemnice contre la doctrine des jésuites. ] Un ministre luthérien, qui a fait l’éloge de Chemnitius, s’exprime de cette manière : Breve quidem, sed nervosum scriptum, durante adhuc concilio Tridentino, jesuitarum theologiæ opposuit, cujus Opusculi cùm Andradius Lusitanus in se suscepisset refutationem, Chemnitio occasionem subministravit conscribendi insigne illud... Opus, quod Tridentini concilii examen nuncupavit [1]. J’ajoute à cela un passage d’Eisengreinius, parce qu’il paraît fournir une petite matière de critique. Cet auteur prétend qu’Andradius a fait des merveilles contre les hérétiques dans ses explications orthodoxes, et surtout contre Chemnitius : Præsertìm contra Martini Kemnitii petulantem audaciam, qui coloniensem censuram, quam à viris societatis Jesu compositam esse ait, unà cum ejusdem sanctissimæ societatis vitæ ratione temerè calumniandam suscepit [2]. Nicolas Antonio, après avoir cité ce passage, censure Eisengreinius d’avoir cru qu’Andradius était jésuite : Hæc ille, dit-il, falsus saltem in eo quod Andradam nostrum unum ex jesuitico sodalitio credidit. Si cette censure n’a pas d’autre fondement que les paroles que don Antonio a citées, je la crois fausse.

(B) Andrada.... maintint son premier écrit contre ce docte adversaire. ] Cet éloge est dû à Chemnice ; et, dans le fond, je ne dis pas plus de bien de lui, que don Nicolas Antoine. Il semble d’abord que ces paroles de l’écrivain espagnol, cui cùm reposuisset profligatissimus hæreticus librum in quo gravissimas adversùs universalem ecclesiam contumelias intorquebat, descendere denuò in campum sibi opus esse Paiva vidit, ut immanem hostem totis viribus profligaret, soient extrêmement désobligeantes ; mais, quand on les pèse bien, on les trouve propres à inspirer de la vanité à Chemnitius. N’est-il pas bien doux de se voir traité comme le Goliath et le Polyphème de son parti, par ceux du parti contraire, lorsqu’on croit d’ailleurs soutenir la bonne cause ?

(C) M. Pellisson ne put pas trouver ses ouvrages dans toute la rue Saint-Jacques. ] Un récit sur ce sujet ne déplaira pas aux curieux. M. Leibnitz, dans ses remarques contre les réflexions sur les différens de la religion [3], allégua entre autres choses, qu’Andradius a fait un livre intitulé, Explicationes orthodoxæ de controversis religionis capitibus, où il enseigne en ces propres termes, que les philosophes qui ont employé toutes leurs forces pour connaître un vrai Dieu, et pour l’honorer religieusement, ont eu la foi qui fait vivre le juste.... ; que ce serait la plus grande cruauté du monde (neque immanitas deterior ulla esse potest) de condamner les hommes aux peines éternelles, pour avoir manqué d’une foi à laquelle il n’y avait pas moyen de parvenir [4]. M. Pellisson répondit d’abord, qu’il n’avait jamais vu cet auteur, et qu’il le chercherait par curiosité, quand il serait à Paris [5]. Quelque temps après, il fit savoir qu’il avait cherché avec soin le livre du docteur portugais Payva Andradius ; « Mais, ajouta-t-il [6], ce n’est pas une petite affaire que de le trouver à Paris. La rue Saint-Jacques ne le connaît pas : les bibliothéques les plus nombreuses ne l’ont point, non pas

  1. Spizelius, in Templo Honoris, pag. 4.
  2. In Catalogo Test. Veritatis, apud Nicol. Anton. Bibl. Hisp., tom. I, pag. 235.
  3. C’est le titre d’un livre de M. Pellisson.
  4. Voyez le livre de M. Pellisson, intitulé de la Tolérance des Religions, pag. 19. Il fut imprimé à Paris, l’an 1692.
  5. Là même, pag. 71.
  6. Là même, pag. 83.