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BALZAC.

je suis fort trompé, si le comte de Pigneranda ne lui fit point cet honneur, lorsqu’il passa par ce pays-là, en retournant en Espagne. M. de Balzac est bien aise de nous apprendre, que ce comte lui avait reproché le zèle ardent de sa plume pour défendre l’honneur de la France. Il nous apprend cela dans la lettre où il réfute le bruit qui courait, qu’il avait composé un manifeste pour le prince de Condé en 1651 [1].

(L) Il fut un des quarante de l’académie française. ] M. Pellisson, ayant dit conformément aux registres de l’académie, que le treizième jour de mars 1634, M. de Boisrobert fit voir une lettre qu’il écrivait de son chef à M. de Balzac, pour l’avertir que, s’il témoignait à la compagnie par ses lettres qu’il désirait d’y être admis, elle le lui accorderait volontiers : M. Pellisson, dis-je, ayant dit cela, ajoute, qu’il ne voit pas dans le registre ce qui suivit, mais qu’infailliblement M. de Balzac sur sa réponse fut reçu peu de temps après dans l’académie [2]. M. de Balzac ne trouve pas qu’en cela M. Pellisson ait été fidèle historien : il reconnaît que M. de Boisrobert l’avait exhorté plusieurs fois à faire un compliment par écrit à l’académie, et l’avait même menace de la part de M. le cardinal, si ce compliment ne venait pas ; mais il soutient qu’il n’avait rien répondu, et qu’au bout de cinq ou six mois on lui apprit qu’il était de l’académie, et qu’on avait vu son nom dans le soleil du petit bon homme M. de la Peyre [3]. D’où il conclut, que si l’on avait présenté à l’académie une lettre de sa part, on avait fait une fausse lettre. Voilà ce qu’il écrivit à M. Conrart, le 22 de septembre 1653. On ne sait pas quel éclaircissement il en reçut, mais on voit par une lettre du 3 de novembre de la même année, que cet éclaircissement l’avait détrompé. Peu s’en faut qu’on ne soupçonne que M. Conrart lui écrivit qu’il avait vu l’original de son Compliment, d’où il faudrait conclure que même les plus grands esprits ne se souviennent pas quelquefois de leurs lettres du temps passé [* 1]. Ce qu’il y a d’incontestable, c’est que M. de Balzac s’est tenu pour bon ct véritable académicien ; car le registre du 14 d’avril 1636 fait foi qu’il lut à l’académie quelque partie de son Prince [4], et on a prouvé par ses lettres imprimées, qu’il envoya à M. du Chatelet quelques ouvrages de sa façon, le priant de les lire à l’académie, et de les accompagner de quelques-unes de ses paroles, qui suffiraient (disait-il) pour le tenir quitte envers elle non-seulement du remercîment, mais encore de la harangue qu’il lui devait [5]. Il venait de dire que l’honneur que l’académie lui avait fait de le mettre de son corps, sans l’obliger d’aller à Paris, étaient deux grâces singulières qu’il avait reçues d’elle en même temps. Je me souviens de deux endroits de ses lettres, où il reconnaît pour ses confrères messieurs de l’académie. Le premier est à la page 16 de ses Lettres choisies, et le dernier à la page 95 de ses Lettres à Chapelain.

(M) Il s’était fait bâtir deux chambres aux Capucins d’Angoulême. ] Je n’ai lu que dans le Ménagiana, qu’il ait eu dessein de prendre l’habit de cet ordre. « M. de Balzac se mit si fort dans la dévotion, qu’il entra dans un couvent de capucins, où il voulait prendre l’habit : il n’y est pourtant pas mort [6]. » Peut-être que, comme bien d’autres, il demanda de mourir dans l’habit de saint François.

(N) Il mourut le 18 de février 1654. ] La liste des académiciens, imprimée à la fin de la seconde édition de l’Histoire de l’Académie, fait vivre M. de Balzac jusqu’en 1657, vu que

  1. * * Joly conclut de la lettre de Balzac que même les plus grands esprits sont sujets à manquer d’attention dans leurs lectures, et pense, 1°. que l’académie française avait reçu, dès son établissement, une lettre au nom de Balzac ; 2°. que cette lettre n’était pas de lui ; 3°. que Conrart ne cherchait pas à persuader à Balzac qu’il était l’auteur de la lettre écrite en son nom, mais que cette lettre était d’une personne autre que celle qui était soupçonnée par Balzac.
  1. Elle est imprimée à la fin du Socrate chrétien.
  2. Hist. de l’Acad., pag. 221. :
  3. La Peyre dédia en 1635 son livre de l’Éclaircissement des Temps à l’académie, avec ce titre : a l’Eminente. Il y fit mettre le portrait du cardinal, en taille douce, avec une couronne de rayons tout autour, chacun desquels était marqué par le nom d’un académicien. Hist. de l’Acad., pag. 195.
  4. Hist. de L’Acad., pag. 221.
  5. Là même, pag. 106.
  6. Ménagiana, pag. 238.