lait principalement dans la connaissance
des antiquités grecques, que
sa sainteté se piquait de savoir[1]. »
Cet auteur ajoute que les objections
que faisait le pape, fournissaient à
Budé un champ assez vaste pour
étaler sa profonde doctrine, et que
le pape, qui ne demandait pas mieux
que d’allonger la négociation et de
ne rien conclure, n’avait garde de
l’interrompre, ni de le faire apercevoir
des digressions où il s’engageait
insensiblement : qu’au contraire, sa
sainteté lui faisait naître de temps en
temps les occasions d’en faire de nouvelles.
Joignez à ceci ce qu’il dit dans
sa préface. « L‘exemple de Budé sert
admirablement à montrer, que
pour être des plus savans, on n’en
est pas plus propre à négocier les
affaires délicates[* 1] ; et l’on me doit
savoir bon gré de l’avoir rapporté,
quand ce ne serait que pour la
rareté du fait. » Mais comment est-ce
que M. Varillas a pu débiter que
Budé avait vécu dans Paris sans
autre conversation que celle de ses
livres, si les deux ambassades sous
Louis XII sont véritables ? Ne fait-il
pas bien connaître qu’il ignorait, non-seulement
ce que Louis le Roy en a
dit, mais aussi ce que Budé en insinue ?
Budé représente à Cutbert Tonstal
de quelle manière il s’était conduit
dans ses études : il avoue qu’il avait
vu en Italie plusieurs savans, et il
ajoute qu’il n’avait pas eu le loisir de
les bien connaître, parce qu’il était
chargé d’affaires publiques. Interim
bis Romam adii, urbesque insignes
Italiæ, doctos ubi homines per transennam
vidi potiùs quàm audivi, et
litterarum meliorum professores tanquam
à limine salutavi, quantùm
scilicet homini licuit Italiam raptim
peragranti nec liberâ legatione[2].
Enfin je remarque qu’il était devenu
homme de cour auprès de François Ier.,
avant l’entrevue de ce prince et de
Henri VIII. Cela paraît par une lettre
d’Érasme, datée du mois de février
1519[3], où il écrit à Budé. Quomodo
tibi successerit expeditio quemadmodùm
vocas aulica partim ex tuis
ad Ludovicum Vivem litteris intellexi[* 2].
Cela paraît encore plus clairement
par une lettre de Budé, où
il parle d’un voyage qu’il devait faire
avec Étienne Poncher promu depuis
peu de jours à l’archevêché de Sens.
Episcopus Parisiensis jam Senonensis
archiepiscopus factus est liberalitate
regiâ, etsi nondum res peracta
est. Totus jam est aulæ, nec nobis
licet cum eo loqui. Quodam tamen
die, cùm in interiori cubiculo principis
esset, dixit mihi se ad te scribere
statuisse. Iturus est propediem in legationem
Narbonem versus cum aulicorum
dispensatorum decurione :
cum quo etiam ire me rex jussit, ut
numerus sim potiùs quàm ut aliquam
operam certam navem in eâ
provinciâ : sic enim interpretor[4].
Il ne marque point l’année dans la
date de cette lettre ; mais on connaît
qu’il l’écrivit pendant que la cour se
remuait à l’occasion de la mort de
l’empereur Maximilien. Cet empereur
décéda le 12 de janvier 1519.
(L) Sa famille...... était nombreuse. ] Il laissa sept fils et quatre filles. On n’en dit pas davantage dans son histoire ; mais j’ai lu dans d’autres livres, qu’à cause qu’il avait un grand nombre de fils et de petits-fils, il ordonna qu’on l’enterrât de nuit ; car il prévoyait que si on l’eût fait de jour, il y aurait en trop de cris de petits enfans, et trop de larmes répandues dans la maison. L’auteur, qui m’apprend cela, remarque que la femme de Budé, bien loin d’empêcher que son mari n’étudiât, lui servait de second aussi-
- ↑ * Cette question de l’aptitude des gens de lettres aux affaires a été agitée de nouveau il y a quelques années. Ce fut à cette occasion que M. de Châteaubriand fit un article intitulé : des lettres et des gens de lettres, inséré dans le Mercure du 3 mai 1806, tome XXIV, pages 201–214.
- ↑ * Bayle, dit Leclerc, aurait dû voir dans la réponse de Budé qui suit la lettre d’Érasme, qu’en effet Budé ne vint à la cour qu’au temps marqué par Le Roy.
- ↑ Varillas, Histoire de François Ier., liv. I, pag. 32. Il cite en marge : Dans la négociation de Budé, maître des requêtes et de la librairie du roi avec Léon X, en 1515. Sainte-Marthe, dans ces Éloges, pag. 6, parle ainsi : Vir tantâ animi contentione musis operatus à civilibus interim negotiis et reipubl. curâ non abfuit. Nam et à Francisco primo in aulam sæpè accersitus et Romam de belli societate cum Leone summo pontifice adversùs Cæsarem et Helvetios contrahendâ unà cum aliquot regni proceribus ab eodem principe legatus est. Il ne dit rien des ambassades sous Louis XII.
- ↑ Epist. Erasmi XXX, lib. II, pag. 156.
- ↑ La LXXe. du IIIe. liv., pag. 262.
- ↑ Epist. Erasmi LIX, lib. III, pag. 245.