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DÉMOCRITE.

eussent associé l’Agresphon [1], dont Suidas a parlé [2]. Ils n’en disent rien : cette omission est moins pardonnable que de n’avoir pas indiqué ce qu’Aulu-Gelle raconte touchant un livre où l’auteur examinait entre autres choses, quot fuerint Pythagoræ nobiles, quot Hippocratæ [3].

Il n’y a personne parmi les modernes qui ait travaillé aussi utilement que Meursius et Jonsius à cette partie de la critique, par rapport aux anciens auteurs de même nom [4]. Mais comme parmi les auteurs de ces derniers siècles la conformité de noms n’a pas été une moindre source de méprises, il a été nécessaire de composer quelque chose sur ce sujet. Un docte Allemand [5] s’y est exercé, et y a bien réussi. Son dessein embrasse les écrivains homonymes anciens et modernes. Son livre [6] fut imprimé à Hambourg l’an 1698 On y trouve marquées une infinité de fautes qui consistent dans l’attribution d’un livre à un auteur qui ne l’a pas fait, et qui n’a eu rien de commun avec l’auteur véritable, que le nom, etc.

(C) On trouve dans Denys d’Halicarnasse un passage dont je parlerai. ] Cet auteur, aussi bon critique qu’historien, observe que Callimachus et les autres grammairiens de Pergame n’avaient rien écrit qui ne fût très-imparfait, touchant l’orateur Dinarque. Il ajoute que Démétrius Magnès, qui avait passé pour très-savant, et qui avait parlé du même orateur, et cela d’un air qui promettait des merveilles, dans son ouvrage des homonymes, s’était néanmoins trompé [7]. Il rapporte tout le passage. On y voit que Démétrius avait d’abord observé qu’il y avait eu quatre Dinarques, et qu’ensuite il avait dit quelque chose de chacun d’eux, en commençant par l’orateur. On y voit aussi tout ce qu’il avait dit de cet orateur. La critique de Denys d’Halicarnasse est très-bonne là-dessus : il se plaint que le discours de Démétrius n’apprend rien, ni de la naissance de Dinarque, ni de son siècle, ni du pays où son éloquence fut employée. C’étaient des choses dont on aurait pu être très-bien informé, si l’on eût voulu prendre la peine de s’en instruire. Denys d’Halicarnasse le prouve en étalant les lumières qu’il avait acquises sur ces points-là par ses recherches. Je me félicite d’avoir eu un semblable goût avant que d’avoir lu cet endroit de Denys d’Halicarnasse : je ne savais point qu’il eût marqué ces défauts de la narration de notre Démétrius, lorsque je blâmai ceux qui font l’éloge d’un homme sans marquer ni le lieu ni le temps de sa naissance et de sa mort, etc. [8]. Ces défauts ne peuvent pas nous consoler de la perte des écrits de cet auteur ; car ses narrations, bien qu’imparfaites, nous rendraient de grands services.

  1. Voyez tome II, pag. 195 la remarque (H) de l’article Apollonius de Tyane.
  2. Suidas, in Ἀπολλώνιος.
  3. Aulus Gellius, lib. XIV, cap. VI.
  4. N’oubliez point ce que j’ai dit d’Allatius dans la remarque (F) de son article.
  5. Joannes Mollerus, Flensburgo Cimber.
  6. Il a pour titre, Homonymoscopia Historico-Philologico-Critica, sive Schediasma παρεργικον de Scriptoribus Homonymis quadripartitum, etc., in-8o.
  7. Δῆμος (lisez Δημήτριος) ὁ Μάγνης ὃς ἔδοξε πολυΐςωρ ἐν τῇ περὶ τῶν ὁμωνύμων πραγματεία, etc. Demetrius Magnesius, qui polyhistor fuisse visus est in tractatu de homonymis, etc. Dionysius Halicarnass., in Judicio de Dinarcho, pag. m. 349.
  8. Voyez les Nouvelles de la République des Lettres, juin 1684, art. V, pag. 500. Édition de 1686.

DÉMOCRITE, l’un des plus grands philosophes de l’antiquité, était d’Abdère dans la Thrace[a]. Il fut élevé par des mages (A), qui lui enseignèrent la théologie et l’astrologie. Il ouït ensuite Leucippe, et apprit de lui le système des atomes et du vide. L’inclination extraordinaire qu’il eut pour les sciences le porta à voyager dans tous les pays du monde où il espéra de trouver d’habiles gens. Il fut trouver les prêtres d’Égypte : il consulta les Chaldéens et les philosophes persans ; et l’on veut même qu’il ait pénétré jusque dans les Indes et dans l’Éthiopie, pour conférer avec les gymnosophistes. Il

  1. Voyez la remarque (A).