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Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T09.djvu/266

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LINGENDES.

qui répondit pour Juste Lipse, vomit mille injures contre Bongars, et le regarda comme l’auteur de l’Idole. Lingelsheim aurait voulu que Bongars en eût demandé justice par le moyen de l’ambassadeur de France. Indignatus sum quùm reperi anagramma sus obnigra, ubi monastico acumine suspicionem suam prodit quasi tu autor esses. Cogitavi, anne per oratorem regium qui Bruxellæ est, si est tibi amicus, negotium bestiæ illi creari posset ob atroces injurias quas in te effundit, cùm tamen author libri non sis, et quam voluptatem in maledicendo cepit, eandem in lite molestâ et infamiâ quæ condemnatos injuriaram manet, perdat [1].

Lipse ne répondit rien ; c’était le meilleur parti qu’il pût prendre : ses amis lui font honneur de ce silence ; ils disent qu’il méprisa généreusement cet adversaire, et qu’à l’exemple d’un dogue qui passe son chemin sans se détourner pour aller mordre un petit chien qui aboie contre lui, il ne daigna s’abaisser à combattre l’anonyme. C’est ainsi qu’on parle presque toujours lorsqu’on ne sait que répondre. Exindè maledicta acerbiora nescio quis terræ filius, Idoli Hallensis (ô Lucianeam blasphemiam igne Turtareo expiandam !) titulo ementito, sparsit in vulgus. Sed prudentioribus amicis suadentibus, Lipsius siluit, et judicio contemsit, atque adeò contemtu solo novum istum Porphyrium vincendum esse censuit. Sic ferè generosior molossus importunum catulum stolidè adlatrantem præterit, nec dente aut pugnâ dignatur [2].

(B) On se trompe quand on assure qu’il avait été secrétaire de Bonsars, et qu’il a publié les lettres qu’ils s’étaient écrites. ] J’en veux ici au savant M. Morhof : voici ses paroles[3] : Bongarsii et Lingelsheimii [4] epistolæ editæ sunt Argentor. an. 1660, in-12 [5]. Erat Bongarsius vir suo tempore magni nominis sub Henrico IV negotiis publicis sæpè admotus.….……. Lingelsheimius itidem vir in publicâ dignitate constitutus, et ad Helvetios legatus, olim Bongarsio ab epistolis litteras Bongarsianas unà cum suis publicavit ; fuit enim inter illos commercium litterarum mutuum. Comparez cela avec la préface du libraire, vous serez épouvanté que d’habiles gens soient sujets à prendre le change d’une manière si énorme. La destinée des auteurs est déplorable, car lors même qu’ils croient appliquer le plus fortement leur attention, ils prennent mal le sens d’un passage très-facile : je crains extrêmement que cela ne me soit arrivé une infimité de fois. Voici ce que le libraire de Strasbourg expose à la tête de son édition. Leges hic Bongarsii et Lingelshemii epistolas multâ eruditione et variis prudentiæ documentis plenas, beneficio nobilissimi amplissimæque dignitatis viri qui Enclytæ Reip. ad Helvetios legatus à clarissimo viro Dn. Francisco Veyrazio eas ut lucem viderent, accepit. Has venerandus hic senex, qui in contubernio illustris Bongarsii duodecim annos eidem ab epistolis vixerat, descripsit integras. Le libraire parle là de deux personnes ; de la première sans la nommer, et de la seconde en la nommant François Veyraz. Celui-ci avait fourni les lettres à l’autre, qui avait été député, de la ville de Strasbourg, en Suisse. C’est sans doute de Veyraz qu’il faut entendre ce que le libraire expose dans la dernière partie du passage que j’ai rapporté : c’est Veyraz qui a été secrétaire de Bongars pendant douze ans, c’est lui qui a copié les lettres que ce libraire a publiées. Il y avait long-temps que Lingelsheim était parti de ce monde lorsqu’elles virent le jour. Ainsi M. Morhof s’est trompé en plusieurs manières [6].

  1. Lingelsheim, epist. LXXVI ad Bongarsium, pag. 228.
  2. Auber. Miræus, in Vitâ Lipsii, ad ann. 1605, pag. m. 24.
  3. Morhofius, Polyhist., lib. I, c. XXIV, pag. 306.
  4. Il fallait dire Lengelshemii.
  5. Voyez l’article Bongars, tom. III, pag. 558, remarque (H).
  6. Voyez l’article Bongars, tom. III, citation (18).

LINGENDES [* 1] (Claude de),

  1. * Joly observe que l’abbé de Marolles, pages 90 et 178 de ses Mémoires, in-folio, écrit Delingendes. Cette orthographe a été conservée dans l’édition donnée par Goujet, en trois volumes in-12 ; mais dans la table de cette édition in-12 on lit : Lingendes (de).