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MONTMAUR.

parti dans une guerre si plaisante : je fis imprimer deux pièces latines de ce professeur, l’une en prose, et l’autre en vers, avec des notes ; et quoique ces deux pièces ensemble ne tinssent que huit pages, je les divisai en deux tomes [* 1]. J’ajoutai ensuite sa Vie, composée par M. Ménage, et tous les vers latins et français que je pus ramasser des uns et des autres ; auxquels je joignis quelques épigrammes latines que j’avais faites sur lui. Comme chacun prenait des noms de guerre, j’en fis de même, et pris celui de Quintus Januarius Fronto. Ces trois noms me convenaient parfaitement : Quintus, parce que j’étais le cinquième de mes frères ; Januarius, parce que je suis né dans le mois de janvier ; et Fronto, parce que j’ai le front large et élevé. Le livre fut imprimé à Paris, en 1643, in-4°. avec ce titre : Petri Monmauri Græcarum litterarum professoris regii Opera in duos tomos divisa, iterùm edita et notis nunc primùm illustrata à Quinto Januario Frontone. Il est fort rare [1]. »

Quelque rare qu’il soit, j’en ai vu pourtant un exemplaire. C’est M. Simon de Valhebert [2] qui m’a fait la grâce de me l’envoyer. Le ridicule à quoi l’on expose le pauvre Montmaur toucherait les plus stupides ; car on y donne pour le premier tome de ses ouvrages un écrit intitulé : Nemesis in maledicos calumniatoris Busbequii Manes, ob convicta ab eo temerè, malignè, falsè, et contrè jus gentium Epistolæ XLII inserta adversùs augusta Galliæ parlamenta, et qui ne contient que deux pages. Il n’y a là que de la prose ; mais le second volume contient un peu de prose et un peu de vers. La prose consiste dans une lettre de trois pages, amicissimo, doctissimo, et suprà sæculi fidem et morem candido D. D. Maigne Ducis Frontiaci μακαρέτου præceptori. Le reste est de la même longueur, et consiste en une élégie dont le titre est presque aussi long que la pièce même. Le voici : Epicedion Generosiss. Principis Eleonori Aurelianensis Ducis Frontiaci, quem xxxv vulneribus confossum in obsidione Montispessulani, fortiter et strenuè dimicantem acerba et immatura mors oppressit annos natum XVII, paucis antè diebus quàm pax firmaretur. Et matris mœstissime illustriss. Princip. Annæ Nomparis Calmontiæ prosopopœia. Ceci avait été imprimé l’an 1622, dix ans avant la courte invective contre Busbec. J’ai vu aussi, par la faveur de M. Simon de Valhebert, un livre in-12, imprimé en Allemagne [3] l’an 1665. Il a pour titre : Epulum parasiticum, quod eruditi conditores, instructoresque Car. Feramusius, Ægid. Menagius, Joh. Franciscus Saracenus, Nic. Rigaltius, et Joh. Lud. Balsacius hilarem epulantibus in modum, Macrino Parasitogrammatico, Gargilio Mamurræ parasito pædagogo, Gargilio Macroni parasitosophistæ, G. Orbilio Muscæ, L. Biberio Curculioni atque Barboni jucundè apparârunt et comiter. Tout cela est précédé d’une préface très-docte et convenable à la matière. Ce Recueil contient les cinq plus fortes satires qui aient paru contre Montmaur. Aussi voyez-vous que des gens d’une érudition profonde s’en mêlèrent : vous voyez M. Rigault dans le titre de ce Recueil : c’est lui qui fit Funus parasiticum, sive L. Biberii Curculionis parasiti, mortualia ad ritum prisci funeris [* 2]. C’est l’une des cinq pièces. On l’a jointe au traité des Kirchmannus de Funeribus Romanorum, à l’édition d’Amsterdam 1672. L’ingénieux Sarrasin qui prit part à cette guerre fut un des plus braves combattans. On voit beaucoup de politesse, et une littérature bien choisie et bien appliquée, dans son Attici secundi G. Orbilius Musca, sive

  1. * Sallengre continuant la plaisanterie de Valois, dit être en état d’ajouter un troisième tome aux Œuvres de Montmaur, et il transcrit une Lettre de Montmaur à Paul Demay, datée du 18 août 1634.
  2. * Le Funus parasiticum est bien de Nicolas Rigault, mais cette pièce n’est point contre Montmaur. Rigault la composa à Poitiers, en 1596, et la fit imprimer à Paris, en 1601, in-4. avant que Montmaur fût connu. C’est l’éditeur de l’Epulum parasiticum imprimé à Nuremberg, en 1665, qui, d’après la remarque de Sallengre, a induit Bayle en erreur.
  1. Valésiana, pag. 36 et suiv. édit. de Hollande.
  2. Bibliothécaire de M. l’abbé Bignon. Voyez ci-dessus, citation (60) de l’article Ésope, tom. VI, pag. 287.
  3. À Nuremberg.