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PATIN.

Caïus, Marcus, ou Publius, en son premier nom. Cette phrase ne vaut rien ; elle porte a croire que Parterculus fut premièrement connu sous l’un de ces noms, et qu’il le quitta pour en prendre un autre. Cet usage est fort commun parmi les modernes : l’un des guerriers français du 17e. siècle, fit parler de lui sous le nom de comte de Bouteville, et puis sous celui de duc de Luxembourg. On ne doit rien penser de semblable touchant notre historien, eu égard au nom de Caïus, ou de Publius, etc. On gardait toujours ces sortes de noms. En un mot, M. Moréri devait dire ou prénom, ou nom propre, et non pas premier nom. II. Il ne fallait pas avancer que Paterculus était originaire de Naples. Où a-t-on trouvé cela ? Il dit que son atavus était d’Asculum[1], et ne l’aïeul de cet atavus était chef des Campanois, Campanorum principis[2].
Ailleurs[3] il assure que son aïeul ne voyait rien au-dessus de lui dans la Campanie. Il n’y a rien là de particulier touchant la ville de Naples, et je m’étonne que M. Dodwel ait voulu prétendre que cette ville était la patrie du grand-père de Paterculus[4] ;
car c’est ce qu’on ne peut conclure de ce que ce bon vieillard se tua soi-même, ne pouvant accompagner Tibère qui se retirait de Naples. M. Doujat est tombé dans ces deux fautes de M. Moréri[5] : c’est apparemment comme son copiste ; d’où nous pouvons recueillir qu’un auteur de dictionnaire a souvent l’honneur d’être consulté et copié par des personnes qui en savent plus que lui, tant on aime à ne point prendre la peine de rassembler les matériaux quand on en trouve des tas tout faits. III. Il est bien vrai que Paterculus fut successeur de son père au commandement de la cavalerie[6] ; mais ce ne fut pas avant que d’avoir été tribun militaire : il avait déjà été tribun de camp[7], charge qui était au-dessus de celle de simple tribun de soldats. IV. Il n’eut point son père pour collègue en aucune charge. V. Magius Céler Velléianus état son frère, et non pas son père. VI. Nous ne trouvons point qu’il ait été lieutenant général de Tibère dans les armées d’Allemagne et de Hongrie, mais en Dalmatie[8]. VII. Et alors son frère qui était absent[9] ne pouvait pas être son collègue.

  1. Paterculus, lib. II, cap. XVI.
  2. Idem, ibidem.
  3. Idem, ibidem, cap. LXXVI. Voyez ci-dessus la remarque (A), citation (1).
  4. Dodwell., in Synopsi Chronolog., ad calcem Annal. Velleian.
  5. Doujat, préface de la traduction de Paterculus.
  6. Missus cum eo (Tiberio) præfectus equitum in Germaniam successor officii patris mei. Paterculus, lib. II, cap. CIV.
  7. Functum antè tribunatu castrorum. Idem, ibidem.
  8. Idem, ibidem, cap. CXV.
  9. S’il eût été présent, se serait-il contenté de dire que son frère avait eu l’avantage d’être avec Tibère.

PATIN (Guy), professeur en médecine au collége royal de Paris, a été un homme de beaucoup d’esprit et de beaucoup de savoir[* 1]. Voyez son éloge à la tête de ses Lettres. Elles sont si connues par tout le monde, que cela me donne dispense de parler de son mérite. Il suffit de faire savoir qu’on en pourra être instruit dans la préface que j’ai indiqués. On serait trop délicat si l’on trouvait à redire, que l’auteur de cet éloge n’ait point donné l’histoire de Guy Patin. C’est ainsi qu’en usent les faiseurs d’éloges : ils ne s’amusent presque jamais à nous apprendre

  1. * Leduchat, et Joly, après lui, disent que Patin n’était pas digne des éloges qu’on lui donne du côté de la science : il ne lisait jamais que les titres des livres, tout au plus les préfaces ; c’est ce qu’un critique fameux a eu de commun avec lui. M. Chardon Larochette (Magasin encyclop. 1812. VI, 414) nous apprend que cette accusation que lui fit Voltaire était fondée. Voltaire (dans son Pauvre diable ) avait dit :

    Il m’enseigna comment on dépeçait
    Un pauvre auteur, comme on le recousait,
    Comme on jugeait du tout par la préface.

    Mercier de Saint-Léger, qui achetait de Fréron les livres dont celui-ci rendait compte, n’en trouvait presque jamais que la préface de coupée.