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Page:Bayle - Dictionnaire historique et critique, 1820, T11.djvu/590

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PERGAME.

mandait-il pas dans Pergame ? Votre Justin pourra-t-il se disculper, s’il ne recourt à quelques critiques qui lisent Nicomèdes, et non pas Eumènes, dans le passage en question ? En second lieu, comme Diogène Laërce ne traite pas historiquement de Pergame, et qu’il ne parle d’Eumènes que par accident, il ne faut point croire qu’il ait cherché avec quelque soin si ce prince s’appelait roi : il lui a suffi de savoir qu’Eumènes avait dans Pergame l’autorité souveraine ; cela, dis-je, lui a suffi pour se servir d’une expression qui signifie la royauté. Il a dit[1] qu’Eumènes, ayant comblé de bienfaits Arcésilas, fut le seul de tous les rois à qui cet auteur dédia des livres. Le passage d’Athénée que j’ai cité n’est pas une chose à m’opposer. On y trouve que Philétære régna dans Pergame ; mais cela ne veut pas dire qu’effectivement il se qualifiait roi. Lisez les historiens modernes des ducs de Savoie, des électeurs de Bavière ou de Brandebourg, etc., vous y trouverez souvent les mots régner, règne, qui ne signifient qu’une autorité exercée sous le nom de duc ou d’électeur. Les médailles qui donnent à Philétærus le titre de roi, si l’on en croit Goltzius [2], sont plus fortes contre Strabon, en cas qu’elles ne soient point supposées. Celles que M. Spanheim a vues ne le qualifient pas ainsi[3]. Au reste, la victoire d’Attale sur les Gaulois fut remportée la dernière année de la 134e. olympiade[4]. C’est l’an 512 de Rome.

(C) Les Athéniens lui firent de grands honneurs. ] Toute la ville, hommes et femmes, et les prêtres avec leurs habits sacerdotaux, furent au-devant de lui. Peu s’en fallut qu’on ne contraignît les dieux à lui rendre le même honneur. C’est Tite Live qui me fournit cette pensée : Rex Piræeum, renovandæ firmandæque cum Atheniensibus societatis causâ trajecit. Civitas omnis obviàm effusa cum conjugibus ac liberis, sacerdotes cum insignibus suis intrantem urbem, ac dii propè ipsi exciti sedibus suis exceperunt[5]. Il remarque qu’Attalus trouva plus conforme à sa dignité de communiquer par écrit ses propositions, que de commettre sa modestie à la nécessité d’étaler lui-même ses services, et de recevoir d’un peuple flatteur une infinité d’applaudissemens. L’historien explique à merveille cette pensée : In concionem extemplò populus vocatus, ut rex quæ vellet, coràm ageret : deindè ex dignitate magis visum, scribere eum, de quibus videretur : quàm præsentem aut referendis suis in civitatem beneficiis erubescere, aut significationibus acclamationibusque multitudinis, assentatione immodicâ pudorem onerantis[6]. La guerre fut conclue contre Philippe, roi de Macédoine. Ce fut alors que, pour honorer Attalus, on proposa d’ajouter une nouvelle tribu aux dix anciennes, et de la nommer Attalide. Ingenti consensu bellum adversùs Philippum decretum. Honores rego primùm Attalo immodici, deindè et Rhodiis habiti : tùm primùm mentio illata de tribu, quam Attalide appellarent, ad decem veteres tribus addenda[7].

(D) Il harangua les Thébains avec tant de force. ] Ceci est assez singulier pour mériter que l’on voie les propres paroles de Plutarque[8] Καὶ μέντοι παρελθών ὁ Τίτος ὡς οὐκ ἔχων τὴν πόλιν, ἔπειθεν ἑλέσθαι τὰ Ῥωμαίων, Ἀττάλου τοῦ βασιλέως συναγορεύοντος ἀυτῷ καὶ συνεξορμῶντος τοὺς Θηϐαίους. ἀλλ’ Ἄτταλος μὲν (ὡς ἔοικεv) τοῦ γήρως προθυμότερον ἑαυτὸν τῷ Τίτῳ ῥήτορα παρασχεῖν ϕιλοτιμούμενος, ἐν ἀυτῷ τῷ λέγειν προσπεσόντος ἰλίγγου τινὸς ἢ ῥεύματος, ἄϕνω τὴν αἴσθησιν ἐπιληϕθεὶς ἔπεσεν, καὶ μετ’ οὐ πολὺ ταῖς ναυσὶν εἰς Ἀσίαν ἀποκομισθεὶς ἐτελεύτησεν. Titus [9] indè, quasi urbe non potiretur affatus eos est, suadens ut in partes Romanorum discederent, adjuvante Attalo et Thebanos incitante. Sed

  1. Ἐχορήγει αὐτῷ πολλὰ Εὐμενὴς ὁ τοῦ Φιλεταίρου· διὸ καὶ τοῦτῳ μόνῳ τῶν ἄλλων Βασιλέων προσεϕώνει· Diogen. Laërtius, lib, IV, num. 38.
  2. Voyez Valesius, Notis ad Excerpta Polybii, pag. 19.
  3. Ésech. Spanhem., de præst. et usu Numismat., pag. 468.
  4. Valesius, Notis ad Excerpta Polybii, pag. 19.
  5. T. Livius, lib. XXXI, pag. 572.
  6. Idem, ibidem.
  7. Idem, ibidem, pag. 573.
  8. Plutarchus, in Vitâ Flaminii, pag. 37, B.
  9. C’est-à-dire Titus Quinctius Flamininus qui était alors consul.