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DICTIONNAIRE
HISTORIQUE ET CRITIQUE
DE PIERRE BAYLE.
S.

SABELLICUS (Marc Antoine Coccius), a ſleuri parmi les savans vers la ſin du XVe. siécle[* 1]. Il était fils d’un maréchal, et il naquit dans une petite ville[a] d’Italie, sur le Tévérone. Il s’appliqua de si bonne beure à l’étude avec tant d’ardeur, qu’il fut capable de régenter une école dans Tivoli avant que d’avoir de la barbe. Ayant gagné quelque argent par cette pédagogie, il alla à Rome pour profiter des leçons de Pomponius[b], qui l’admit dans son académie avec les cérémonies ordinaires, et nommément avec celle de l’imposition d’un nouveau nom : ce fut celui de Sabellicus. Le nouvel académicien de Pomponius réforma son style dans cette école. Il sortit de Rome pour aller enseigner dans Udine, proche d’Aquilée. Il se fit connaître par quelques ouvrages si avantageusement, que les magistrats de Vicence lui offrirent une pension deux fois plus grande, et l’attirèrent par ce moyen dans leur ville, pour la profession des belles-lettres. Il n’y demeura guère ; car il se vit appelé par le Sénat de Venise pour deux emplois honorables et lucratifs : l’un était celui d’écrire l’histoire de la république, l’autre était celui d’enseigner les belles-lettres. Il s’acquitta mieux du dernier que du premier ; car son ouvrage historique fut rempli de flatteries et de mensonges (A). Il entreprit ensuite de composer, une Histoire universelle depuis le commencement du monde, et s’appliqua à ce travail jusques à sa mort. Cet ouvrage a vu le jour et n’est pas fort estimé (B). Sabellic mourut de la vérole, à l’âge d’environ soixante et dix ans (C).

  1. * Niceron a donné, dans le tome XII de ses Mémoires, un article à Sabellicus, où il relève quelques fautes de Bayle, et quelquefois adopte d’autres autorités que les siennes. Joly, qui se contente de renvoyer à Niceron, dit que l’édition du Justinus et Florus, à laquelle Niceron donne la date de Venise, 1495, in-folio, est sans nom d’imprimeur et sans date.
  1. On la nomme en latin Vicus Varronis, ou Vicus Valerius. Voyez Léandre Albert, Descriptio Ital. pag. m. 224.
  2. C’est ainsi que Paul Jove le nomme. C’est le fameux Pomponius Lætus.