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SUR LE PRÉTENDU JUGEMENT DU PUBLIC.

rateur de la même académie ? Peut-on rien voir de plus sale que les Baudii Amores, livre publié à Leyde par le professeur Scrivérius ? Le recueil de poésies de Daniel Heinsius, professeur aussi à Leyde, n’en contient-il pas de très-lascives ? Tous ces écrits et plusieurs autres n’ont-ils pas été tolérés ? Les consistoires et les synodes ont-ils fait des procédures, ou contre les écrivains, ou contre les livres ? Je ne dis rien du commentaire d’un professeur de Franeker sur la pastorale de Longus ; j’en ai parlé dans mon Dictionnaire [* 1]. Je souhaite seulement que l’on prenne garde qu’un commentateur qui cite des impuretés est mille fois plus excusable qu’un poëte qui en compose. Quand on m’aura fait connaître le secret de recueillir dans une compilation tout ce que les anciens disent de la courtisane Laïs, et de ne point rapporter pourtant des actions impures, je passerai condamnation. Il faut du moins qu’on me prouve qu’un commentateur n’est pas en droit de rassembler tout ce qui s’est dit d’Hélène ; mais comment le prouverait-on ? Où est le législateur qui ait dit aux compilateurs : Vous irez jusque-là, vous ne passerez point outre : vous ne citerez point Athénée, ni ce scoliaste, ni ce philosophe ? Ne sont-ils pas en possession de ne donner point d’autres bornes à leurs chapitres que celles de leur lecture ? Mais voici un meilleur moyen de satisfaire les critiques. Je veux corriger dans une seconde édition les défauts de la première. Je m’occupe à cela avec toute mon application. Je ne me contenterai pas de rectifier ce qui est défectueux par rapport ou à l’histoire, ou à la chronologie, etc. j’ôterai même les expressions et les manières trop libres, etc. ; et je supplie tous mes lecteurs, et principalement ceux qui sont membres des consistoires flamands, français, etc., en ce pays-ci, de m’aider par leurs remarques à mettre mon Dictionnaire en bon état pour une nouvelle édition. Les ouvrages de cette nature, et surtout quand ils sont faits à la hâte, et avec peu d’aides, ne sont d’abord qu’une ébauche informe. Ils se perfectionnent peu à peu : chacun en sait des exemples.

XXXV. Le dernier mensonge que j’indique est à la dernière page de l’imprimé. On y voit, 1°. que je prépare un nouveau Dictionnaire, où il n’y aura rien que de grave, de sage, de pur et de judicieux ; 2°. qu’on sait de bonne part que je cherche un grand nom, distingué non-seulement par la qualité, mais par le mérite et la piété, pour mettre à la tête. Je n’ai rien à dire sur le premier point ; car puisque mon adversaire m’avertit, que l’on a fait un grand préjudice à mon Dictionnaire en le préconisant par avance, c’est à moi à profiter de ce bon avis. Car que serait-ce, si j’allais moi-même vanter un livre que je n’ai pas fait encore ? Sa malignité contre le libraire se découvre ici : il veut préparer le monde à ne se point soucier de mon supplément. Sur le second point je lui déclare qu’il a été mal servi par ses nouvellistes. À ce

  1. * Tome IX, pag. 354.