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PRÉFACE

M. Vaultier a si justement méritées.

Dans l’édition que l’on donne ici de ces Remarques l’on a eu soin de corriger plusieurs fautes d’impression outre celles qui ont été indiquées dans l’Errata de l’édition de Paris. On n’a point tenu la même conduite à l’égard des fautes de langage, on les a laissées comme elles étaient ; mais, de peur que les étrangers, qui ont assez de disposition à se servir de ces phrases, ne vinssent à croire qu’elles sont bonnes, ou que l’usage ne s’est encore déclaré ni pour ni contre, on a fait des notes qui apprennent que ce sont des barbarismes de province. Il est sûr que nos grammairiens les plus indulgens s’accordent tous à rejeter de semblables expressions, comme des vices de terroir qui naissent au voisinage des Allobroges. Cela ne doit faire aucun préjugé ni contre l’esprit ni contre l’érudition du critique de M. Vaultier ; car il y a des provinciaux très-spirituels et très-savans qui ne s’aperçoivent que fort tard des mauvaises phrases de leur pays. Les autres notes qu’on a faites servent à rectifier ou à éclaircir le texte, ou à donner des ouvertures aux correcteurs du Moréri. On a cru qu’il fallait en user ainsi pour empêcher que les lecteurs ne se trompassent quelquefois en prenant toujours pour vraies les remarques de l’anonyme. Il est sans doute trop raisonnable pour trouver mauvais que l’on ait eu pis à cœur les intérêts du public que son intérêt particulier. Et comme il paraît disposé à continuer ses remarques, ce qui est un dessein très-digne d’approbation, et qui peut contribuer beaucoup à l’utilité publique, l’on a jugé qu’il exécuterait son dessein, et qu’il ferait valoir son talent avec plus de vigilance et d’une manière plus profitable aux éditeurs du Dictionnaire historique, si l’on critiquait quelquefois ses notes critiques. Je dis quelquefois, parce qu’il y a dans son ouvrage certaines choses sur quoi nous n’avons point fait de réflexion, quoique nous eussions pu les accompagner d’une remarque. En voici un exemple.

Il trouve mauvais[a] que dans l’énumération des ouvrages de Jacques Almain on ait oublié celui qui regarde les laïques. Les circonstances mêmes du temps, ajoute-t-il, devaient engager l’éditeur à en parler avec un peu d’exactitude. On peut critiquer justement cette censure, car la plupart des lecteurs n’y comprendront rien. Un ouvrage qui regarde les laïques est quelque chose de si vague, que l’on s’en peut faire cent idées différentes. Les circonstances du temps ne sont pas à la vérité un objet si vague, mais néanmoins elles renferment plusieurs choses ; et ainsi un lecteur qui ne connaît pas précisément le caractère de cet ouvrage d’Almain, n’en pourra jamais deviner la relation au temps présent. Or comme un Dictionnaire historique doit servir de bibliothéque aux ignorans, il faut faire en sorte que les lecteurs y trouvent assez de clarté pour entendre sans d’autres secours ce qu’on

  1. Ci-après à l’article Almain, pag. 396.