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DE M. BAYLE.

à les corriger. Il faudrait donc que les éditeurs eussent toujours sous les yeux ces premières éditions, et les comparassent ligne à ligne avec les suivantes. De plusieurs exemples qu’on pourrait donner des corruptions qui se sont glissées dans celle-ci, on en marquera seulement un. M. Moréri avait dit dans l’article de Gilles le Maître, que le duc de Mayenne et les autres chefs de la Ligue nommèrent Jean le Maître président au parlement de Paris à la place de Barnabé Brisson, et qu’en cette qualité on les députa aux prétendus états du royaume, tenus à Paris en 1593 ; que le légat y proposa la publication du concile de Trente sans réserve ni modification ; que l’affaire était assez délicate d’elle-même ; que le Maître, et du Vair alors conseiller, eurent ordre de l’examiner, etc. Il y a là une faute qui a été corrigée dans les éditions de Hollande, où l’on a mis on le députa, au lieu de on les députa ; mais on y a gâté un autre endroit, car au lieu de le Maître, et du Vair alors conseiller, on a mis le Maître et du Vair, alors conseillers. Cette faute se trouve dans l’édition de Paris, 1699. Et cela fait voir que l’attention des éditeurs est quelquefois bien relâchée, car en lisant le mot conseillers ils ne se sont point souvenus que deux ou trois lignes auparavant ils avaient lu que le Maître avait été député en qualité de président [1]

La dernière chose que je veux observer est qu’il se glissera toujours de nouvelles fautes dans les éditions du Moréri malgré toute l’attention et l’habileté des réviseurs, s’ils ne prennent eux-mêmes la peine de corriger exactement toutes les épreuves, ou s’ils ne les font corriger par des gens fort éclairés et fort attentifs. C’est par la négligence du correcteur d’imprimerie que l’on trouve dans l’édition de Paris, 1699, à l’article Lodrin, une faute bien grossière qui avait été corrigée dans les éditions de Hollande. Voici cet article selon l’édition de Lyon, 1688.

Lodrin, ville et golfe d’Albanie, dans la Grèce. Il ne faut pas la confondre avec Lodron, seigneurie du pays de Trente en Italie, proche du Braslan.

Tout cela se trouve dans l’édition de Paris, 1699 ; mais dans l’édition de Hollande dont je me sers, qui est celle de l’an 1698, on a mis comme il fallait Bressan, au lieu de Braslan, et l’on a retenu la ligne suivante qui est,

Lodron. Voyez Lodrin.

Elle a été retranchée dans l’édition de Paris ; mais il aurait mieux valu la conserver, parce qu’il y a beaucoup de lecteurs qui ne trouvent point ce qu’ils cherchent dans un dictionnaire, s’il n’y paraît alinéa. Le meilleur moyen de corriger était d’effacer ces paroles, il ne faut pas la confondre avec, et de mettre la suite alinéa. Ce sont des paroles qui, sans qu’on en avertisse personne, apprennent assez aux lecteurs qu’il ne faut point confondre Lodron avec Lo-

  1. Dans l’édition de 1707 et suiv., on trouve un article séparé de Jean le Maître, où au lieu de on les députa, on a mis le deputèrent ; et on a effacé alors conseiller. Nouv. Observ.