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ZÉNON.

possit negari[1]. J’ai trouvé aussi le passage du Ier. livre des Questions académiques ; le voici : Carneades nullius philosophiæ partis ignarus, et ut cognovi ex iis qui illum audierant, maximèque ex Epicureo Zenone [2] qui quum ab eo plurimùm dissentiret, unum tamen præter cæteros mirabatur, incredibili quâdam fuit facilitate[3]. Je n’ai point trouvé le passage du IIe. livre de Finibus[4] ; mais j’ai trouvé ceci dans le premier livre : Hic mihi Phædrum, inquam mentitum, aut Zenonem putas, quorum utrumque audivi, quum mihi nihil sanè præter sedulitatem probarent. Omnes mihi Epicuri sententiæ satis notæ sunt, atque eos quos nominavi cum Attico nostro, frequenter audivi, quum miraretur ille quidem utrumque, Phædrum autem etiam amaret, quotidièque inter nos, ea quæ audiebamus, conferebamus : neque erat unquàm controversia quid ego intelligerem, sed quid probarem [5]. Ajoutons à ces trois passages celui où le pontife Cotta, contemporain de Cicéron, reconnaît qu’il a été le disciple de ce fameux épicurien : Zenonem, quem Philo noster coryphœum appellare epicureorum solebat, quum Athenis essem, audiebam frequenter, et quidem ipso autore Philone, credo ut faciliùs judicarem, quàm illa benè refellerentur, quum à principe epicureorum accepissem quemadmodùm dicerentur. Non igitur ille, ut plerique, sed isto modo, ut tu, distinctè, graviter, ornatè. Sed quod in illo mihi usu sæpè venit, idem modò quum te audirem acciderat, ut molestè ferrem tantum ingenium (bonâ veniâ me audies) in tam leves, ne dicam in tam ineptas sententias incidisse[6]. M. Ménage n’a point imité Gassendi, qui nous renvoie à l’une des lettres de Cicéron à Atticus, afin d’y trouver la grande amitié de ces deux illustres Romains pour notre Zénon : Quando Cicero et ipsum audivit et de eodem ad Atticum scribens : Zenonem, inquit, tam diligo quàm tu[7]. Gassendi se trompe ; ce me semble. Cette lettre de Cicéron fut écrite l’an 702 de Rome. Quelle apparence que Zénon fût encore en vie, lui qui était déjà fort vieux lorsque Cicéron assista à ses leçons, l’an de Rome 674.[8] ? Quelle apparence que s’il eût été en vie l’on ne trouvât rien sur son grand âge dans la lettre de Cicéron que Gassendi a citée ni dans la lettre précédente, où il est parlé du même homme ? Notez que dans les meilleures éditions, par exemple dans celle de M. Grævius, cet homme ne s’appelle point Zénon, mais Xénon. Le sentiment de Manuce est incomparablement meilleur que celui de Corradus. Selon Corradus, il s’agit là du philosophe épicurien[9] ; mais selon Manuce, il s’agit d’un homme d’affaires de Pomponius Atticus[10]. Remarquez que plusieurs croient que Lucrèce fut disciple de notre Zénon[11] ; et voyez ce que nous avons observé[12] contre le Mémoire où le baron des Coutures a été repris d’avoir avancé que Zénon était l’honneur de la secte épicurienne.

(B) Vossius s’y est trompé. ] Il a dit[13], 1°. que Zénon le Sidonien : philosophe de la secte d’Épicure, fut disciple d’Apollodore ; 2°. que cet Apollodore fut disciple d’Épicure. Il cite Diogène Laërce pour l’un et pour l’autre de ces deux faits , et il se trompe quant au dernier ; car Diogène Laërce dit seulement qu’Apollodore, surnommé κηποτύραννος, horti tyrannus, fut un sectateur illustre de la doctrine d’Épicure[14]. S’il

  1. Cicero, Tuscul. Quæst., lib. III, cap. XVII.
  2. Il y a dans mon édition ex Epicuro et Zenone. C’est une faute.
  3. Cicero, Academic. Quæst. lib. I, in fine.
  4. Fabricius, in Vitâ Ciceronis, ad ann. 674, cite aussi de IIe. livre de Finibus.
  5. Cicero, lib. I, de Finibus, cap. V.
  6. Idem Cicero, de Nat. Deorum, lib. I, cap. XXI.
  7. Gassendus, de Vità et Moribus Epicuri, lib. II, cap. VI, page m. 187 ; il cite Cicéron, lib. I, de Nat. Deor., (mais là on ne trouve point que Cicéron ait ouï Zénon, car c’est Cotta qui parle) et lib. V, epist. XI.
  8. Zenonem Athenis Cicero et Atticus A. V. DCLXXIV, olymp. 175 senem audiverint. Jonsius, de Script. Hist. Philos., p. 183.
  9. Corradus, in Ciceronis epist. XI libri V, ad Atticum, page 407, edit. Græv.
  10. Manutius, in X epistolam Ciceronis ad Attic., lib. V, page 151, editionis Græv. Voyez le même Cicéron, epist. XXXVII libri XIII, ad Atticum, et ibi Manutium, aliosque Comment.
  11. Voyez l’article Lucrèce, remarque (M), tome IX, page 523.
  12. Là même.
  13. Vossius, de Hist. Græcis, lib. I, cap. XVI, page 105, et lib. IV, cap. X, page 466.
  14. Diog. Laërt., lib. X, num. 25.