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AMPHIARAÜS.

fils de Mélampus (A), qui avait reçu en don une partie du royaume d’Argos, pour avoir rendu un grand service aux femmes de ce pays-là[a]. Ce partage du royaume fut une semence de discorde, dont on remarqua les grands effets au temps d’Adraste, roi d’Argos, qui se vit contraint d’abandonner ses états, ne se pouvant maintenir contre la faction d’Amphiaraüs[b]. Celui-ci avait fait mourir Talaüs, père d’Adraste, et s’était saisi de la couronne [c]. On pacifia cette querelle par le mariage d’Amphiaraüs avec Ériphyle, sœur d’Adraste ; de sorte que ce dernier fut rétabli. J’en parle ailleurs[d] ; et cela sans oublier les nouvelles brouilleries où Ériphyle, qui fut choisie pour arbitre, décida en faveur d’Adraste, au préjudice de son mari. Le tour qu’elle fit à son époux pendant les préparatifs de l’expédition de Thèbes fut une vilaine action. Amphiaraüs, averti par son esprit prophétique qu’il périrait dans cette guerre, ne voulait pas y aller, et se cacha : mais sa femme, gagnée par un présent, découvrit où il était[e]. Il fallut donc que, malgré lui, il accompagnât les autres princes à l’expédition de Thèbes. Elle fut très-malheureuse, et il y périt d’une façon étonnante, car la terre ayant été entr’ouverte par un coup de foudre, il fut englouti dans cet abîme, avec son chariot (B). Ceux qui disent que ce malheur lui arriva le jour même que l’armée s’approcha de Thèbes[f] se trompent : il ne mourut que le jour de la retraite ; et le siége avait duré quelque temps. Cette funeste aventure a servi de thème à quantité d’écrivains ; d’où il est venu que les circonstances n’en ont pas été rapportées uniformément. Il y a eu des réflexions assez mauvaises sur cette espèce de mort (C). On a cru qu’Amphiaraüs sortit des enfers (D), et l’on a marqué la scène de sa résurrection [g]. Il fut mis au nombre des dieux : on lui consacra des temples : son oracle fut très-célèbre (E) : les jeux qu’on institua en son honneur[h] firent du bruit. On croit qu’il excella principalement à deviner par les songes (F) ; mais il ne se borna point à cela : il fut l’inventeur des divinations qu’on fait par le feu. Il conçut un ressentiment si vif contre sa femme, qu’il ordonna aux enfans qu’il avait eus d’elle de la tuer, dès que l’âge le leur permettrait[i]. On lui a donné de grands éloges, et entre autres celui-ci, qu’il travaillait à être honnête homme, et non pas à le paraître (G). Grand sujet à réflexions (H). Apollodore, si je ne me trompe, est le seul qui l’ait inséré dans le catalogue des Argonautes [j] ; car Apollonius, ni Hyginus, ni Valérius Flaccus, ne l’ont point fait. On le compte parmi les gens sages qui ont eu

  1. Voyez l’article de Mélampus.
  2. Pindarus, Od. IX Nemeor., p. 608.
  3. Voyez le Commentaire de Benoît sur Pindare, là même, pag. 608, 609.
  4. Dans la remarque (F) de l’article Adraste,
  5. Voyez l’article d’Alcméon, fils d’Amphiaraüs.
  6. Charles Étienne, et Lloyd, dans leurs Dictionnaires : Olivier sur Val. Max., liv. VIII vers la fin, et plusieurs autres.
  7. Voyez dans la citation (45).
  8. Voyez Benoit sur Pindare, Ode VII Olymp., pag. 143.
  9. Cela fut exécuté par Alcméon, son fils. Voyez son article.
  10. Apollodorus, lib. I, pag. 53.