Page:Bazan - Vol de papillons, 1887.djvu/6

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.

géant Galifron ; lorsque, arrivé au moment où le prince Charmant épouse la Belle aux cheveux d’or, il me dit tout à coup :

— Quand tu seras grande, te marieras-tu, Berthe ?

— Mais certainement, toutes les demoiselles se marient, n’est-ce-pas ?

— Oh ! non, pas toutes… mais c’est que si tu te maries un jour, il y a longtemps que je veux te demander cela, voudras-tu de moi pour ton prince Charmant !

— Mais tu n’es pas du tout un prince charmant, puisque tu t’appelles Henry Coustou ?

— C’est une façon de parler cela, Berthe ; enfin, voudras-tu de moi pour ton mari quand tu seras grande ?

— Je ne sais pas trop ; tu es très gentil, mais tu n’as pas de moustaches.

— Oh ! mais, j’en aurai Berthe, je te promets que j’en aurai !…

— Bien sûr ? bien vrai ?

— Bien vrai, bien sûr…

— Alors, je pense que je me déciderai à t’épouser, mais tu seras très complaisant, tu m’aideras à habiller mes poupées, et tu me raconteras toujours des histoires ?

— Absolument tout ce que tu voudras, mais tu sais, c’est pour de bon que je demande cela ; tu n’oublieras pas ?

— Oh ! non, c’est bien promis !

— Attends, dit Henri, pour que je sois sûr que tu te souviendras de ta promesse, je vais faire comme mon grand cousin, le jour où il a demandé Mlle Dinard en mariage ; c’était dans la forêt, tu sais, près de la vieille fontaine… j’étais assis sur l’herbe et j’entendais toutes leurs paroles.

— C’est juré, Marguerite, c’est pour la vie, disait mon cousin en lui prenant la main, et elle répondit : « C’est juré, c’est pour la vie ! » Alors, en souriant, il tira un couteau de sa poche, et grava sur un arbre un A et un M, Armand et Marguerite, puis au-dessous il dessina un cœur enflammé, et il ajouta : « Nous reviendrons voir cet arbre quand nous serons mariés… » et ils sont mariés, et je suis bien sûr qu’ils iront voir l’arbre..

Et, ce disant, Henry, tira vivement un canif de sa poche,

— Mais, Henry, que veux-tu faire ? lui dis-je, nous ne sommes pas dans la forêt il n’y pas d’arbres ici…

— C’est vrai, attends, je vais graver un B et un H sur le montant de la croisée.

— Malheureux ! et ma grand’mère qui l’a fait repeindre il y a un mois, mais elle nous mettrait à la cave pour sûr !…

Henry réfléchit une seconde, mais s’écria : « J’ai trouvé ! » et s’approchant derrière la bergère, il incrusta avec son canif sur le côté du montant en bois de droite, un H et un B qui avaient assez bonne façon.