Page:Bazin - La Barrière, Calmann-Lévy.djvu/135

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lèvres spirituelles et éclatantes, des yeux vifs sous des paupières langoureuses : vous la connaissez. Elle savait tout. Pas une émotion. Elle est très forte. Tout de suite une liberté, un entrain, des mots drôles. Elle emmène Félicien : « Je suis chez moi, au Salon, monsieur, venez par ici. » Nous suivons. D’un commun accord, tacite, nous nous laissons distancer. Elle causait beaucoup ; son joli bras, armé de l’ombrelle, se levait quelquefois ; Félicien parlait peu ; nous pensions : « Cela va normalement, » mais nous ne pouvions pas nous le dire encore…

M. Limerel continuait le récit de l’entrevue. Et, sans doute, il exagérait le rôle de la personne qu’il aimait le mieux, et de beaucoup ; cependant, il ne parlait pas que de lui-même, de ses habiletés, de ses réflexions, de ses reparties. Par exception, il s’efforçait de raconter ce qu’avaient dit ou fait les autres. L’attention passionnée de madame Limerel, l’interrogation pressante, continue, de ce regard fixe, de cette bouche entr’ouverte, de tout ce visage tendu en avant, agissaient sur l’homme le moins indulgent qui fût à ce qu’il appelait le romanesque des mères. Cette mère-là, les yeux creusés,