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Page:Bazin - La Terre qui meurt.djvu/37

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les fossés ! L’homme n’avait repris que malgré lui et faute de mieux le soin des bêtes et le manche de la charrue. La proximité de Challans, de ses cabarets et de ses auberges peu sévères le tentait. Les camarades le relançaient, et il se laissait entraîner, toujours faible et passif. Le mardi surtout, qui est jour de marché, le père ne voyait que trop souvent ce fils de vingt-sept ans quitter la métairie, sous des prétextes variés, à l’heure brune, pour ne rentrer que tard dans la nuit, abruti, insensible aux reproches. Il en ressentait une peine qui ne le quittait point. A cause de François, la Fromentière n’était plus le lieu sacré que tous aimaient, défendaient, d’où personne ne songeait’à s’éloigner. Dans cette salle où la famille était en ce moment rassemblée, que de mères, que d’enfants, que d’aïeux unis ou résignés avaient vécu ! Dans ces hauts lits qui garnissaient les murs, quelles lignées innombrables avaient été conçues, nourries, s’étaient couchées enfin, tranquilles, pour la dernière fois ! On avait souffert là et pleuré, mais on n’avait point été ingrat. Toute une forêt aurait été remise sur pied, si le bois brûlé dans cette cheminée, par des gens du même nom, avait pu reprendre racine. Qu’en serait-il désor-