Page:Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/273

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les deux amis remarquèrent une certaine excitation parmi les habitués de la pension où ils étaient descendus, et l’on causait bruyamment d’une catastrophe arrivée quelque part et où il y avait eu des pertes de vies. Sans trop faire attention à ce que l’on disait, les jeunes gens commandèrent à déjeuner et se mirent en frais de mettre la main à leur toilette ; car l’on descend toujours plus ou moins chiffonné d’un wagon de chemin de fer, après un voyage de nuit.

On se mit à table où quelques personnes étaient en train de causer, et Jules et Pierre prêtèrent machinalement l’oreille à la conversation. Un grand jeune homme assis près d’eux, lisait à haute voix, dans un journal français qu’il tenait à la main, les détails d’un incendie terrible qui avait détruit toute une filature et causé la mort d’un grand nombre d’ouvriers. Chacun risquait ses commentaires, et les deux amis qui ne connaissaient rien de l’affaire, demandèrent à leurs voisins, ce dont il s’agissait.

— Comment ! leur répondit-on, vous ignorez qu’un feu terrible a consumé une manufacture, hier matin, à Fall River ?

— Mais oui ! nous n’en savons rien, répliqua Jules, puisque nous arrivons de Montréal, ce matin même.