Page:Beaugrand - Jeanne la fileuse, 1878.djvu/79

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demment. Je m’empresse de vous dire que ces obstacles ne sauraient venir de moi ; tout au contraire. Il est donc de mon devoir, avant d’aller plus loin, de vous raconter les détails de cette histoire ; mes enfants eux-mêmes n’en connaissent rien, et c’est pourquoi je vais saisir l’occasion de les instruire sur ce sujet. Quand vous m’aurez entendu, vous me direz, après mûres réflexions, si vous désirez encore épouser ma fille. Je vous répondrai alors, mais pas auparavant.

Jules et Pierre se regardèrent avec surprise et la pauvre Jeanne devint pâle et tremblante. Quel terrible secret pouvait-il donc y avoir entre les deux familles, pour faire hésiter le vieillard dans une circonstance aussi solennelle ?

Le père Girard ne parut pas observer le trouble que ses paroles avait causé, et après avoir arrangé son fauteuil, il commença le récit de l’histoire promise :

—  « Afin que vous puissiez bien comprendre toute la portée des faits que je vais vous raconter, mes enfants, il va me falloir remonter un peu loin. Ma famille habite Contrecœur depuis plusieurs générations, et les Girard ont toujours été considérés comme bons Canadiens et honnêtes citoyens, de père en fils. Comme tous les jeunes hommes d’alors, j’ai fait dans ma jeunesse plusieurs excur-