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LA CHASSE-GALERIE

chantier de la Gatineau. C’est moi qui gouvernais, cette fois-là, et je vous assure que j’avais l’œil ouvert et le bras solide. Nous remontâmes la rivière Outaouais comme une poussière jusqu’à la Pointe à Gatineau et de là nous piquâmes au nord vers le chantier. Nous n’en étions plus qu’à quelques lieues, quand voilà-t-il pas cet animal de Baptiste qui se détortille de la corde avec laquelle nous l’avions ficelé, qui s’arrache son bâillon et qui se lève tout droit, dans le canot, en lâchant un sacre qui me fit frémir jusque dans la pointe des cheveux. Impossible de lutter contre lui dans le canot, sans courir le risque de tomber d’une hauteur de deux ou trois cents pieds, et l’animal gesticulait comme un perdu en nous menaçant tous de son aviron qu’il avait saisi et qu’il faisait tournoyer sur nos têtes en faisant le moulinet comme un Irlandais avec son shilelagh. La position était terrible, comme vous le comprenez bien. Heureusement que nous arrivions, mais j’étais tellement excité, que par une fausse manœuvre que