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LETTRES DE VOYAGE

tienne, cette ville a appartenu tour-à-tour aux Maures, aux Espagnols, et depuis 1831, aux Français, qui l’ont conservée. Voici la description qu’en fait M. Piesse, dans son travail sur l’Algérie que j’ai déjà souvent cité :

« Oran, tour à tour arabe, espagnole et turque, est aujourd’hui une ville française, bien percée, bien bâtie, bien aérée, dont l’accroissement est prodigieux et dans laquelle la population européenne circule avec l’activité fiévreuse que donne le mouvement de plus en plus grand des affaires commerciales dans cette partie de notre colonie. On y voit encore défiler comme dans une lanterne magique : les militaires de tous grades et de tous corps, zouaves, turcos, chasseurs à pied et à cheval, spahis et artilleurs ; les juifs portant le costume de leurs compatriotes du Maroc : la lévite, le pantalon à pied et le bonnet noir ; — les juives, splendidement belles et couvertes de robes damassées d’or et de soie, quand elles ne sont pas laides et sordidement vêtues, sous leur châle rouge sang de bœuf ; — les Espagnols venus des villes ou des huertas de l’Andalousie, vêtus de grègues blanches, de l’alhamar, couverture de grosse laine rouge, et le mouchoir roulé autour de la tête, costume qui trahit son origine mauresque ; — les manolas, gaies, vives, bruyantes, remplissant comme à Alger, les fonctions de bonnes d’enfant ou de ménagères, mais n’ayant plus rien de national dans leurs vêtements ; — les Maures, insouciants, fatidiques, ne se trouvant pas trop étonnés de circuler au milieu des Européens ; puis, comme dans tous les grands centres de l’Algérie, les différentes races d’indigènes venus du dehors, et se partageant tous les