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Page:Beaumarchais - Œuvres choisies Didot 1913 tome 1.djvu/165

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DRAMATIQUE SÉRIEUX. 129 II n'en est pas ainsi de l'effet d'un drame tou- chant, pnisé dans nos uiœurs. Si le rire bruyant est ennemi de la réflesion, l'attendrissement au con- traire est silencieux : il nous recueille, il nous isole de tout. Celui qui pleure au spectacle est seul, et plus il le sent, plus il pleure avec délices, et .sur- tout dans les pièces du genre honnête et sérieux qui remuent le cœur par des moyens si vrais, si natu- rels. Souvent au milieu d'une scène agréable, une- émotion charmante fait tomber des yeux des larmes abondantes et faciles, qui se mêlent aux traces du sourire, et peignent sur le visige lattendrissement et la joie. Un conflit si louchant n'est-il pas le plus lieau triomphe de l'art, et l'état le plus doux pour l'ame sensible qui l'éprouve.^

L'attendrissement a de plus cet avantage moral sur le rire, qu'il ne se porte sur aucun objet sans agir en même temps sur nous par une réaction puis-i santé.

Le tableau du malheur d'un honnête hom.m& frappe au cœur, l'ouvre douce-iicnt , s'en empare, et le force bientôt à s'examiner soi-même. Lorsque je vois la vertu persécutée, victime de la méchan- ceté , mais toujours belle, toujours glorieuse, et préférable à tout, même au sein du malheur, l'effet du drame n'est point équivoque , c'est à elle seule que je m'intéresse; et alors si je ne suis pas heureux moi-même ; si la basse envie fait ses efforts pour me noircir; si elle m'attaque dans ma personne, mon honneur ou ma fortune, combien je me plais à ce genre de spectacle! et quel beau sens moral je puis en tirer! le sujet m'y porte naturellement. Comme je ne m'intéresse qu'au malheureux (jui souffre in- justement, j'examine si par légèreté de caractère, défaut de conduite, ambition démesurée, on con- currence malhonnête , je me suis attiré la haine|qui

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