Page:Beaumarchais - Œuvres complètes, Laplace, 1876.djvu/779

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de mes concitoyens, que le patriote pillé valait autant pour la patrie que les patriotes pillards à qui, je crois (bien malgré vous), la pauvre France est près d’être livrée.

Alors tous les propriétaires qui s’endorment sur un abîme sentiraient le danger qu’ils courent, et s’uniraient, en s’éveillant, pour repousser le brigandage ; car patrie sans propriété est un mot si vide de sens, que ceux qui feignent le plus d’y croire n’en font pas moins tous leurs efforts pour devenir, à vos dépens et aux miens, patriotes propriétaires. Inde colères, inde querelles, inde pillages tolérés, inde tous ces écrits sur l’égalité prétendue en faveur de ceux qui n’ont rien contre tous les gens qui possèdent, ce qui mérite l’attention des surveillants que nous avons choisis : comme si, à leur tour, ces pillards ne devaient pas être pillés par ceux qui suivraient leur exemple ! comme si un cercle de destructions pouvait servir l’harmonie de la civilisation, à la liberté d’aucun peuple !

Faisons la paix, monsieur Manuel : vous et moi avons mieux à faire qu’à nourrir de pamphlets la curiosité des oisifs. Je ne répondrai plus à rien.

LETTRE XLIII.

À M. CHABOT.

7 juin 1792

En lisant ce matin, monsieur, dans le Logographe du jour, votre éloquent rapport sur le comité autrichien, dans lequel on m’avait appris que je me trouvais dénoncé, j’ai vu que mes amis traitaient trop légèrement ce rapport, qu’ils appelaient une capucinade. Sa lecture m’a convaincu qu’il faut examiner soi-même et non pas juger sur parole un orateur de votre force, et surtout de votre justice.

Vous y dites, monsieur, qu’un commissaire de la section du Louvre m’a dénoncé pour avoir acheté dix mille fusils en Brabant. Vous dites que l’on en a la preuve au comité de surveillance : que ces fusils sont déposés dans un lieu suspect, à Paris. Vous dites qu>

, :’. Voilà des faits très-positifs : il semblerait qu’il ne me faut que des chevaux pour Orléans. Eh bien ! dans un temps plus tranquille je mépriserais ces vains bruits : mais je vois des -erieux d’exercer de lâches vengea échauffant le peuple, en l’égarant par des soupçons qu’on fait jeter sur tout le monde, et que l’on donne à commenter aux brigands des places publiques.

Je vous observe donc, monsieur, que si vous avez eu l’annonce, au comité de surveillance, que soixante le fusils sont cachés par moi da • (ce qui suppose que

vous le connai— I s plus suspect que ce lieu, de n’avoir pas fait à l’instant tout ce qu’il faut pour vous en emparer. L’n vrai comité autrichien, payé pour nuire à la patrie, n’agirait pas iai.

eà cette observation que je somm ment la municipalité de Pari— M. Il la tête) de déclarer publiquement, à peine de haute trahison, où est le dépùt des fusils que cachés dans Paris. Il est bien temps que. dans un corps composé de bons eitoj hes qui le • rent soient d n connus.

Dans le court exposé de la trahison qu’on m’impute, vous n’avez fait que trois erreurs, qi relever puisqu’il en • Il est bien vrai, monsieur, que j’ai ai payé, non pas soixant

comme vous le dites, mais soixante mille en Hollande, où ils sont encore aujourd’hui r contre le droit des gens, dans un des ports de la Zélande. Depuis deux mois je n’ai i — pour qu’il en demandai raison au gouvernement hollandais : ce et je le sais par notre ministre à la Haj. I ici son téi r attes ils à tout le mond M Ch’t.

Il est bien vrai aussi que j’ai fait venir à Paris, non pas

— rougir, ajoutant que la,

à votre c

lement, pour qu’on juge quelle est leur forme, et leur calibre, et leur bonté. Mais puisque vous avez l’honnête discrétion de ne pas indiquer ]■ pect où je les tiens cachés, je vais, moi, p naissance pour la grande bonté du rapporteur Chabot ; pour l’honneur de mon di

pour la bienveillante inaction de la municipalité, qui parle

bas au sieur Chabot de mon dépôt, qu’elle connaît et ne fait rien pour s’en saisir : je vais nommer ce lieu suspect.

Je tiens ces deux fusils cachés… (ô ciel ! que vais-je déclarer ?…) dans le grand cabinet du ministre de la guerre, près de la croisée à main gauche, d’où je sais que M. Servan ne refusera point de les faire exhiber, toutes les fois qu’il s’agira de constater ce grand délit, par la dénonciation duquel vous avez si bien établi le vrai comité autrichien, et mes relations avec lui ! Je prie M. Servan de vouloir attester le fait des deux fusils à tout le monde, excepté vous : je dis excepté vous, Monsieur, parce qu’on n’espère point ramener l’homme qui dénonce une atrocité réfléchie contre sa conviction intime.

Mais pourquoi, direz-vous, si vous n’êtes pas coupable, ces achats et cette cachette chez le ministre de la guerre ? Et moi, qui n’ai point de motifs pour envelopper ce que je dis sous des formes insidieuses, comme le fait M. Chabot, je parlerai sans réticence.

Lorsque j’ai proposé de substituer dans nos possessions d’outre-mer, à mesure de leurs besoins.