mise dans une des pages de mon discours sur la Mère coupable : que tout homme qui n’est pas né un épouvantable méchant finit toujours par être bon quand l’âge des passions s’éloigne, et surtout quand il a goûté le bonheur si doux d’être père.
Les maux du corps sont des accidents de notre être. Je suis sourd, moi, comme une urne sépulcrale ; ce que les gens du peuple nomment sourd comme un pot. Mais un pot ne fut jamais sourd ! au lieu qu’une urne sépulcrale, renfermant des restes chéris, reçoit bien des soupirs et des invocations perdues auxquelles elle ne répond point ; et c'est de là qu’a dû venir l’étymologie d’un grand mot que la populaire ignorance a gâté.
Je m’aperçois depuis longtemps que je suis refaiseur de proverbes. Adieu. S’il m’échappe d’autres bluettes littéraires, vous les aurez comme la Mère coupable.
LETTRE XLIX.
AU CITOYEN BAUDIN (DES ARDENNES).
15 vendémiaire an VI (6 octobre 1797).
À mon retour de la campagne, énergique défenseur de la justice et de l’humanité, je dois vous remercier de l’excellent discours sur le système affreux des déportations générales. Si la question n’eût pas encore été jugée, votre discours l’eût emportée. Et ce qui m’en frappa le plus, c’est la chaleur de ce pur sentiment qui vous porte à traiter, même après coup, avec de nouvelles lumières, une question qui semblait épuisée par la longueur des discussions. Cet amour expansif du bien en matière si importante vous honore, s’il se peut, plus encore que le très-grand talent que vous y avez déployé.
Le besoin irrésistible de consolation dans les maux de la vie, avez-vous dit, est le principe de tout système de religion. Cela est vrai, très-éminemment vrai. D’après ce moment, il est interdit de chercher quelle est la meilleure ou la pire. Aussi ne l’avez-vous pas fait. Vous avez raisonné en bon législateur. Il faut de la révélation, de l’inspiration, et des prêtres, pour établir une croyance, quelle qu’elle soit ; vous l’avez dit encore. Reste à savoir quels biens politiques nous font ces œuvres de persuasion, et s’il vaut mieux tromper les hommes que leur dire la vérité. L’indifférence pour le choix de toute secte qui s’établit est la majestueuse conduite que doit tenir celui qui fait des lois ; et vous avez très-justement blâmé l’homme qui s’est permis d’émettre une opinion partiale, à la tribune retentissante, sur un objet qui n’était pas de son ressort.
Humains, humains, soyons doux et cléments !
Nous sommes tous plus faibles que méchants.
Conquête de Naples, ch. xiv.
Je ne suis pas aussi content que vous du livre de M. Necker sur les opinions religieuses ; et son exemple du commerce, dont vous avez usé vous-même, ne me paraît pas très-exactement comparé. Le commerce est d’une utilité bien prouvée ; il fallait donc l’encourager, même avec les maux qu’il a faits. Nous n’en pouvons pas dire autant du mot abstrait qu’on nomme religion : car il devient vide de sens s’il signifie religion en général, qui, excepté celle que l’on adopte, n’est pour le plus intrépide croyant qu’un rainas de folles visions dans louies celles auxquelles il ne croit pas. Nul do nous n’osant dire que ce ramas a quelque utilité dans les religions qui sont fausses, et pur cela même funestes, aucun de nous n’esl obligé de pardonner les maux qu’elles oui faits, quand elles ont été dominantes, en faveur de l’utilité, comme ou le dii du liant commerce.
Le grand soin du législateur est de faire si bien que, Ions ayant liberté sur la leur, aucune d’elles m- domine : d’où suil que nul n’a droit d’en tourmenter un autre sur la croyance dont il esl ; et ladessus, monsieur, vous (Mes inexpugnable, el devenez l’auguste protecteur de toutes les victimes que l’anarchie a laites parmi les prêtres. Mais votre raisoi nienl de la page 27, où vous comparez les déportés aux émigrés, me parait ni al heureusement propre .1 vous faire taxer de rigueur, comme vous paraissez le craindre : car la déportation forcée n’ayant aucun rapport à l’émigration volontaire, la première ne présente qu’un homme malheureux, quand l’autre nous montre un coupable : | quoi rangerions-nous dans la classe des malheurs qu’on nomme irréparables la déportation qu’ont subie des prêtres pour leurs opinions, lorsque, pour excuser notre conduite à leur égard, vous êtes vous-même obligé de supposer que les coupables émigrés pourraienl peut-être se prévaloir d’un rappel accorde a tant de n ia 11 icii ceux tonsurés ; et même de supposer encore qu’on n’a proscrit que les hommes ardents, lorsque nous savons tous que ce n’esl pas tel ou tel séditieux qu’on a trié entre les prêtres, mais tous les prêtres qu’on a traités comme suspn-ts d’étresuspt cts de sentiments antirépublicains ? Excepté ce fléchissement vers un avis dont vous ne pouvez cire, tout votre ouvrage esl un chef-d’œuvre de honte, de douce humanité, de discussion législative ; el vous avez tonné contre le principe dangereux de se mettre au-dessus des rormes, en assurant, ce qui est vrai, que, celle barrière franchie, il n’esl aucun terme prévu ou l’on puisse indiquer que l’autorité gouvernante s’arrêtera dans les abus de son pouvoir.
Salut, estime, vénération.
LETTRE L.
AI’ PROPRIÉTAIRE DU o BIEN-INFORMÉ ». Ce r, brumaire an VI (i novembre 1197). Cl roî EN,
Lorsque, pour succéder au journal le plus ins-