Page:Beaumont - Contes moraux, tome 1, Barba, 1806.djvu/85

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être heureux avec une telle femme, quand même elle serait aussi laide que vous le pensez ? Je suis donc résolu à lui déclarer mon nom, et à lui offrir de partager ma puissance. Effectivement, dans le premier bal, le prince apprit sa qualité à l’inconnue, et lui dit qu’il n’y avait point de bonheur à espérer pour lui, s’il n’obtenait pas sa main : mais, malgré ces offres, Belote s’obstina à demeurer masquée, ainsi qu’elle en était convenue avec sa sœur. Voilà le pauvre prince dans une inquiétude épouvantable. Il pensait, comme Laidronette, que cette personne si spirituelle devait être un monstre, puisqu’elle avait tant de répugnance à se laisser voir ; mais quoiqu’il se la peignît de la manière du monde la plus désagréable, cela ne diminuait point l’attachement, l’estime, et le respect, qu’il avait conçus pour son esprit et pour sa vertu. Il était tout prêt à tomber malade de chagrin, lorsque l’inconnue lui dit : Je vous aime, mon prince, et je ne chercherai point à vous le