d’un ennemi ; jamais théorie si insociale n’est sortie d’une secte si morale et si pure ! quoi qu’il en soit, les quakers refusent de faire partie de l’armée et même de la milice américaine. — « Ainsi, disais-je un jour à un quaker de Philadelphie, une nation attaquée par un autre peuple qui en veut à son existence n’a pas le droit de se défendre ! » — « Non, me répondit le quaker ; la guerre, la résistance, la violence, sont contraires à l’esprit de l’Evangile. Quand nous trouvons dans les livres saints un principe, nous ne nous bornons pas à l’admirer, nous le mettons en pratique. Le Christ commande aux hommes de vivre en paix, c’est donc désobéir à ses lois que de faire la guerre. Notre conviction à cet égard est telle, que jamais nous ne porterons les armes, quelle que soit la puissance humaine qui veuille nous y contraindre. En 1812, lorsque l’Angleterre et les États-Unis entrèrent en guerre, un grand nombre de quakers de Philadelphie furent désignés pour marcher contre l’ennemi, mais tous refusèrent en se fondant sur les principes de leur religion. On les traduisit devant les tribunaux, qui les condamnèrent à de fortes amendes ; ils ne les payèrent pas. Alors on saisit et on vendit leurs biens ; ceux qui n’en avaient pas furent jetés en prison. Nous aurions à notre disposition tous les trésors de l’univers, que jamais nous ne voudrions acquitter l’amende portée contre nous en pareil cas. Le paiement serait une sorte d’acquiescement ; quand on nous traîne en prison, c’est une violence à laquelle nous cédons, et qui n’entraîne de notre part aucune adhésion de nos volontés. » Je ne discuterai pas ce raisonnement, dont le vice est trop facile à saisir. Ainsi l’autorité demande aux citoyens de s’armer pour la défense du pays, et voilà toute une secte religieuse qui résiste au pouvoir, parce que l’Evangile a recommandé la paix et la douceur ; de sorte qu’un précepte sublime, enseigné par Dieu, devient, entre les mains de l’homme, la source d’un crime, car il tue le patriotisme.
Ici, du reste, je dois faire observer que les quakers ne sont pas hostiles aux institutions américaines, au gouvernement républicain des États-Unis ; nulle secte, au contraire, n’est plus démocratique que la leur ; mais ils sont hostiles à toute société, parce que la première loi de tout être existant,