Page:Beauvoir - Les mystères de l’île Saint-Louis, tome2.djvu/183

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
176
LES MYSTÈRES DE L’ILE SAINT-LOUIS

le roi, la cour, vous surtout, qui m’avez toujours si ardemment protégé. Ce n’est pas vous qui vous joindriez à mes ennemies acharnées, à la Montespan, la d’Humières, la Monaco !

— Ah ! fi ! mon cher comte, pourquoi me parler de ces pécores. Vous n’avez au monde qu’une amie, une sœur, reprit la maréchale avec une effusion hypocrite ; ne me faites jamais l’injure de douter de moi.

— Maréchale, dit Lauzun, vous êtes aujourd’hui d’un carmin à éblouir. M. de Roquelaure est un drôle trop heureux !

— Il me semble l’entendre, dit la maréchale en se levant ; oui, c’est sa voix !

Lauzun écouta, une voix rauque chantait le Noël suivant :


Oui, les tourterelles
Me disent bossu
Lanturlu,
Mais je n’ai point su
Trouver de rebelles !


— C’est lui ! plus de doute ! murmura la maréchale ; s’il me rencontrait, il irait droit se plaindre à sa famille. Que sais-je, moi, il invoquerait la séparation ! Monsieur de Lauzun, oh ! cachez-moi, par pitié ! Je l’entends, il vient, il tourne la clef de ce cabinet !

La clef tourna en effet dans ses gonds, et la voix du duc retentit de nouveau, mêlée au timbre éclatant de plusieurs voix d’hommes.

Le comte ouvrit à la maréchale l’issue qui restait ; il venait à peine d’en refermer la porte sur elle, quand Roquelaure, d’Humières et Monaco se précipitèrent gaiement dans son boudoir. Ils étaient suivis de Riom et de Lavardin.