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DES DÉLITS ET DES PEINES.

SUPPLÉMENT AU CHAPITRE VII.

DES COMMISIONS, etc.


« François Ier, étant à Marcoussi, devant le tombeau de Montagu, décapité sous Charles VI, il lui échappa de dire que c’était dommage qu’un tel homme fût mort par justice. Un moine, qui était présent, lui répondit : Sire, il ne fut pas condamné par justice, mais par commissaires.

» Le prince qui substitue des juges forcés aux organes ordinaires de la loi, annonce le dessein de satisfaire des vengeances ; et la seule différence qu’on puisse apercevoir entre les commissaires qu’il nomme et des assassins, c’est que les premiers se chargent d’infliger la mort, en la faisant précéder de la cérémonie d’une sentence, et que les derniers la donnent eux-mêmes, et sur-le-champ.

» Sous quelque couleur qu’on présente les tribunaux d’exception, quelque nom qu’on leur donne, sous quelque prétexte qu’on les institue, on doit les regarder comme des tribunaux de sang.

» N’attendez de ces tribunaux ni pitié, ni humanité, ni sentiment de justice ; ne vous reposez pas même avec confiance sur le caractère qu’ont pu montrer jusque-là les individus qui les composent.