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DES DÉLITS ET DES PEINES.

La prétendue nécessité de purger l’infamie est encore un des absurdes motifs de l’usage des tortures. Un homme déclaré infâme par les lois, devient-il pur, parce qu’il avoue son crime tandis qu’on lui brise les os ? La douleur, qui est une sensation, peut-elle détruire l’infamie, qui est une combinaison morale ? La torture est-elle un creuset, et l’infamie un corps mixte qui vienne y déposer tout ce qu’elle a d’impur ?

En vérité, des abus aussi ridicules ne devraient pas être soufferts au dix-huitième siècle.

L’infamie n’est point un sentiment sujet aux lois, ou réglé par la raison. Elle est l’ouvrage de l’opinion seule. Or, comme la torture même rend infâme celui qui l’endure, il est absurde qu’on veuille ainsi laver l’infamie par l’infamie même.

Il n’est pas difficile de remonter à l’origine de cette loi bizarre, parce que les absurdités adoptées par une nation entière, tiennent toujours à d’autres idées établies et respectées chez cette même nation. L’usage de purger l’infamie par la torture semble avoir sa source

    est inutile ; et Beccaria, en ôtant les supplices cruels, a, en quelque sorte, ôté aussi les grands scélérats.