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DES DÉLITS ET DES PEINES.

Tel est, du moins à, mon avis, le tempérament qu’on pourrait prendre pour assurer à la fois la sûreté des citoyens et leur liberté, sans favoriser l’une aux dépens de l’autre. Ces deux biens sont également le patrimoine inaliénable de tous les citoyens ; et l’un et l’autre sont entourés de périls, lorsque la sûreté individuelle est abandonnée à la merci d’un despote, et lorsque la liberté est protégée par l’anarchie tumultueuse.

Il se commet dans la société certains crimes, en même temps assez communs et difficiles à constater. Dès-lors, puisqu’il est presque impossible de prouver ces crimes, l’innocence est probable devant la loi. Et comme l’espérance de l’impunité contribue peu à multiplier ces sortes de délits, qui ont tous des causes différentes, l’impunité est rarement dangereuse. On peut donc ici diminuer également le temps des procédures et celui de la prescription.

Mais selon les principes reçus, c’est principalement pour les crimes difficiles à prouver, comme l’adultère, la pédérastie, qu’on admet arbitrairement les présomptions, les conjectures, les demi-preuves, comme si un homme pouvait être demi-innocent ou demi-