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DES DÉLITS ET DES PEINES

nombre de personnes qu’il n’a pas même choisies. Inspiré par l’autre, il cherche à étendre le bonheur sur toutes les classes de l’humanité.

La morale particulière exige que l’on se sacrifie continuellement soi-même à une vaine idole que l’on appelle le bien de la famille, et qui le plus souvent n’est le bien réel d’aucun des individus qui la composent. La morale publique apprend à chercher son bien-être sans blesser les lois ; et si quelquefois elle excite un citoyen à s’immoler pour la patrie, elle l’en récompense par l’enthousiasme qu’elle lui inspire avant le sacrifice, et par la gloire qu’elle lui promet.

Tant de contradictions font que les hommes dédaignent de s’attacher à la vertu, qu’ils ne peuvent reconnaître au milieu des ténèbres dont on l’a environnée, et qui leur paraît loin d’eux, parce qu’elle est enveloppée de cette obscurité qui cache à nos yeux les objets moraux, comme les objets physiques.

Combien de fois le citoyen qui réfléchit sur ses actions passées, ne s’est-il pas étonné de se trouver malhonnête homme ?

À mesure que la société s’agrandit, chacun de ses membres devient une plus petite