Page:Beccaria - Des délits et des peines, traduction CY, Brière, 1822.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
3
CHAPITRE PREMIER

philosophe qui, du fond de sa retraite obscure et dédaignée, a eu le courage de jeter parmi la multitude les premières semences long-temps infructueuses des vérités utiles[1] !

Les vérités philosophiques, répandues partout au moyen de l’imprimerie, ont fait connaître enfin les vrais rapports qui unissent les souverains à leurs sujets et les peuples entre eux. Le commerce s’est animé, et il s’est élevé entre les nations une guerre d’industrie, la seule digne des hommes sages et des peuples policés.

Mais si les lumières de notre siècle ont déjà produit quelques avantages, elles sont loin d’avoir dissipé tous les préjugés qui nous restent. On ne s’est élevé que faiblement contre la barbarie des peines en usage dans nos tribunaux. On ne s’est point occupé de réformer l’irrégularité des procédures criminelles, de cette partie de la législation aussi importante que négligée dans toute l’Europe. On a rarement cherché à détruire, dans leurs principes, ces suites d’erreurs accumulées depuis plusieurs siècles ; et bien peu de personnes ont tenté de réprimer, par la force des vérités immuables, les abus d’un pouvoir sans bornes,

  1. On a voulu désigner ici J. J. Rousseau.