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SUPP. AU CHAP. IV.

au principe contraire à celui dont nous prenons ici la défense.

» Pourquoi les législateurs regardent-ils et font-ils regarder les lois qu’ils établissent, comme irrévocables ? n’est-ce pas parce qu’ils croient que leur volonté actuelle, autorisée par le consentement actuel des citoyens existans, lie et oblige pour jamais tous les citoyens nés et à naître ? Si des conventions faites il y a plusieurs siècles lient même les volontés qui n’existaient pas, l’examen le plus modéré d’une loi pourra être un crime punissable des peines les plus cruelles dans une législation ; car on peut supposer, et l’hypothèse a été réalisée plus d’une fois, quoique les exemples n’en soient pas actuellement présens à ma mémoire, on peut supposer qu’à la confection des premières lois, on a stipulé qu’on punirait de mort tout homme qui oserait rappeler à l’examen une loi quelconque ; et la punition sera juste, si les volontés des premiers citoyens, au moment de la formation de la société, ont obligé tous leurs descendans jusqu’à la fin des siècles.

» Selon le critique même à qui on répond ici, la loi, une fois revêtue de la forme autorisée, n’oblige tous les citoyens nés et à naître, que jusqu’à ce qu’elle soit révoquée par une autre loi revêtue des mêmes formalités. Il accorde donc que les citoyens actuels peuvent faire révoquer une loi ancienne, et en faire établir une nouvelle. Or, je lui demande comment s’y prendront les citoyens actuellement