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DES DÉLITS ET DES PEINES.

liront, moins il y aura de délits ; car on ne peut douter que, dans l’esprit de celui qui médite un crime, la connaissance et la certitude des peines ne mettent un frein à l’éloquence des passions.

Que penser des hommes, lorsqu’on réfléchit que les lois de la plupart des nations sont écrites en langues mortes, et que cette coutume barbare subsiste encore dans les pays les plus éclairés de l’Europe ?

De ces dernières réflexions il résulte que, sans un corps de lois écrites, une société ne peut jamais prendre une forme de gouvernement fixe, où la force réside dans le corps politique, et non dans les membres de ce corps ; où les lois ne puissent s’altérer et se détruire par le choc des intérêts particuliers, ni se réformer que par la volonté générale.

La raison et l’expérience ont fait voir combien les traditions humaines deviennent plus douteuses et plus contestées, à mesure qu’on s’éloigne de leur source. Or, s’il n’existe pas un monument stable du pacte social, comment les lois résisteront-elles au mouvement toujours victorieux du tems et des passions ?

On voit encore par là l’utilité de l’imprimerie, qui seule peut rendre tout le public,