Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
122
VATHEK,

avoit donné de vives alarmes ; ceci étoit pis encore. Elle prit donc le parti d’écrire à la princesse Carathis, pour lui apprendre que tout alloit mal, qu’on avoit manqué net aux conditions du parchemin, qu’on avoit mangé, couché & fait vacarme chez un vieux Emir, dont la sainteté étoit fort redoutable, & qu’enfin il n’y avoit plus d’apparence qu’on eût jamais les trésors des sultans préadamites, Cette lettre fut confiée à deux bûcherons, qui coupoient du bois dans une des grandes forêts de la montagne, & qui connoissant les routes les plus courtes, arrivèrent dans dix jours à Samarah.

La princesse Carathis jouoit aux échecs avec Morakanabad, quand les messagers arrivèrent. Depuis quelques semaines elle avoit abandonné les hautes régions de sa tour, parce que tout lui sembloit en confusion parmi les astres, lorsqu’elle les consultoit pour son fils. Elle avoit beau répéter ses fumigations, & s’étendre sur les toîts, dans l’espérance d’avoir des visions mystiques ; elle ne rêvoit que pièces de brocard, bouquets & autres niaiseries pareilles. Tout cela l’avoit jettée dans un abattement dont toutes les drogues qu’elle composoit ne pouvoient pas la retirer, & sa dernière ressource étoit Morakanabad,