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CONTE ARABE

fanfares & des trompettes ; mais on avoit beau tymbalaler, on ne pouvoit s’empêcher d’entendre les cris de l’Emir & de ses barbons, qui à force de pleurer, étoient devenus aveugles, & n’avoient pas un poil de reste. Nouronihar, à qui cette musique faisoit de la peine, fut fort aise quand elle ne fut plus à portée de l’ouir. Elle étoit avec le Calife dans la litière impériale, & ils s’amusoient à se représenter toutes les magnificences dont ils devoient être bientôt entourés. Les autres femmes se tenoient bien tristement dans leurs cages, & Dilara prenoit patience, en pensant qu’elle alloit célébrer les rites du feu sur les augustes terrasses d’Istakhar.

En quatre jours, on se trouva dans la riante vallée de Rocnabad. Le printems y étoit dans toute sa vigueur ; & les branches grotesques des amandiers en fleurs, se découpoient sur l’azur d’un ciel étincelant. La terre jonchée d’hyacinthes & de jonquilles, exhaloit une douce odeur ; des milliers d’abeilles, & presque autant de santons, y faisoient leur demeure. On voyoit alternativement rangés sur les bords du ruisseau, des ruches & des oratoires, dont la propreté & la blancheur étoient relevées par le verd brun des hauts cyprès. Ces pieux solitaires s’amusoient à