Page:Beckford - Vathek 1787 Paris.djvu/15

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successeurs. Laissons-le faire, disoit-il aux génies8 qui sont toujours prêts à recevoir ses ordres : voyons où ira sa folie & son impiété ; s’il en fait trop, nous saurons bien le châtier. Aidez-lui à bâtir cette tour9 qu’à l’imitation de Nimrod, il a commencé d’élever ; non comme ce grand guerrier pour se sauver d’un nouveau déluge, mais par l’insolente curiosité de pénétrer dans les secrets du Ciel. Il a beau faire, il ne devinera jamais le sort qui l’attend.

Les génies obéirent ; & quand les ouvriers élevoient durant le jour la tour d’une coudée, ils y en ajoutoient deux pendant la nuit. La rapidité avec laquelle cet édifice fut construit, flatta la vanité de Vathek. Il pensoit que même la matière insensible se prêtoit à ses desseins. Ce prince ne considéroit pas, malgré toute sa science, que les succès de l’insensé & du méchant, sont les premières verges dont ils sont frappés.

Son orgueil parvint à son comble lorsqu’ayant monté, pour la première fois, les onze mille degrés de sa tour, il regarda en bas. Les hommes lui paroissoient des fourmis, les montagnes des coquilles, & les villes des ruches d’abeilles. L’idée que cette élévation lui donna de sa propre grandeur, acheva de lui tourner la tête. Il alloit s’a-